Aide médicale à mourir: le CMQ souhaite que le Code criminel soit amendé dans les meilleurs délais
Malgré la prorogation des travaux parlementaires à Ottawa, le Collège a acheminé au ministre de la Justice un mémoire concernant le projet de loi C-7, apportant des modifications au Code criminel relativement à l’aide médicale à mourir.
Il y a un an, le 11 septembre 2019, la juge Christine Baudouin rendait son jugement dans la cause Truchon c. Procureur général du Canada. Elle répondait favorablement à la demande d’accès à l’aide médicale à mourir (AMM) de Jean Truchon et Nicole Gladu, deux personnes qui n’étaient pas « en fin de vie », et dont la mort naturelle n’était pas « raisonnablement prévisible », des critères alors imposés respectivement par la Loi concernant les soins de fin de vie au Québec et le Code criminel.
Du même coup, la juge Baudouin déclarait inconstitutionnels ces deux critères, ouvrant ainsi l’accès à l’AMM à tous les Canadiens répondant aux autres impératifs légaux. Elle octroyait un délai de six mois aux deux paliers de gouvernement pour modifier leurs lois en conséquence.
Le gouvernement du Québec a, pour sa part, rendu le critère de « fin de vie » de la loi québécoise inopérant depuis le 12 mars 2020, sans autre modification législative.
Du côté fédéral, la situation est plus complexe. Le ministre de la Justice, M. David Lametti, a déposé à la Chambre des communes le projet de loi C-7 apportant des modifications au Code criminel relativement à l’AMM, afin de se conformer au jugement Baudouin. Toutefois, le gouvernement fédéral a demandé deux délais supplémentaires, d’abord en raison de la campagne électorale à l’automne 2019, puis du fait de l’urgence sanitaire causée par la COVID-19 depuis mars dernier. L’échéance a finalement été reportée au 18 décembre 2020.
Dans l’intervalle, si une personne qui remplit les autres critères légaux, mais dont la mort naturelle n’est pas « raisonnablement prévisible » demande une AMM, un tribunal compétent doit autoriser son administration.
Aujourd’hui, alors que le gouvernement fédéral proroge les travaux de la Chambre des communes, l’étude du projet de loi est retardée jusqu’à la lecture du discours du trône du 23 septembre.
Le Collège impatient de voir le projet de loi C-7 à l’étude
Afin que cesse l’incertitude juridique, préjudiciable aux patients qui souffrent et aux médecins qui les accompagnent, le Collège souhaite que le Code criminel soit amendé dans les meilleurs délais.
À cet effet, le Collège a récemment acheminé un mémoire portant sur le projet de loi C-7 au ministre de la Justice du Canada, document qu’il rend aujourd’hui accessible au public.
Rappelons que le projet de loi C-7 apporte plusieurs modifications :
- Abrogation de la disposition exigeant que la mort naturelle soit raisonnablement prévisible pour être admissible à l’AMM;
- Précision que l’AMM n’est pas permise lorsque la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée;
- Création de deux séries de mesures de sauvegarde à respecter avant l’administration de l’AMM, chacune s’appliquant selon que la mort naturelle est raisonnablement prévisible ou non :
- Si la mort naturelle est raisonnablement prévisible : contre-signature de la demande d’AMM par un seul témoin indépendant, abolition du délai de 10 jours entre la demande et l’administration de l’AMM et possibilité de renonciation au consentement final en cas d’inaptitude et à certaines conditions;
- Si la mort naturelle n’est pas raisonnablement prévisible : contre-signature de la demande d’AMM par un seul témoin indépendant, confirmation du respect des critères par deux médecins dont un possédant une expertise concernant la condition dont souffre la personne, période d’évaluation minimale de 90 jours pouvant être raccourcie en cas de perte imminente de l’aptitude ou si les évaluations sont terminées, et clarification du consentement éclairé.
Bien que le Collège soit favorable à plusieurs des modifications apportées au Code criminel par le projet de loi C-7, qu’il juge plus adaptées au vécu des patients et des cliniciens, il émet cependant de sérieuses réserves concernant l’instauration de mesures de sauvegarde variables, selon la prévisibilité de la mort de la personne qui demande une AMM.
Dans son mémoire, le Collège recommande principalement le retrait de la notion de « mort naturelle raisonnablement prévisible » et la mise en place des mêmes mesures de sauvegarde pour tous, peu importe la prévisibilité de la mort.