Retour aux nouvelles

Violence conjugale : savoir la dépister et intervenir

Avis du coroner

26/08/2022

Avis du coroner

À la lumière des constats et des recommandations formulés par le Bureau du coroner, le Collège recommande à ses membres une formation et des ressources qui permettront de mieux reconnaître les signes de violence conjugale, pour agir rapidement.

La violence conjugale1 se caractérise par une série d’actes répétitifs, qui se produisent généralement selon une courbe ascendante. Elle comprend les agressions psychologiques, verbales, physiques et sexuelles ainsi que les actes de domination sur le plan économique. Elle ne résulte pas d’une perte de contrôle, mais constitue, au contraire, un moyen choisi pour affirmer son pouvoir sur l’autre personne. Elle peut être vécue à tous les âges de la vie.

Personne n’est à l’abri de la violence conjugale, toutefois il existe des contextes de vulnérabilité en lien avec certains groupes d’âge (ex. : adolescence, personnes âgées), l’origine (ex. : personnes autochtones ou immigrantes), certains handicaps, ou encore l’identité ou l’orientation sexuelle2. Même si elle est de plus en plus exposée dans les médias, cette violence n’est pas toujours visible. Il faut donc être à l’affût de signes et symptômes subtils, en lien avec celle-ci.

Constats et recommandations

Afin d’étudier le phénomène, le Bureau du coroner a mis sur pied un Comité d’examen des décès liés à la violence conjugale. Dans son premier rapport annuel intitulé Agir ensemble pour sauver des vies, plusieurs facteurs contributifs à ces décès ont été identifiés et des pistes de solution, visant à prévenir de tels actes de violence, ont été mises de l’avant.

Le Comité a émis deux recommandations qui concernent notamment le Collège des médecins. La première, visant différents ordres professionnels du domaine de la santé, est « … de former les intervenantes et intervenants en périnatalité et en suivi après l’accouchement à la problématique de la violence conjugale et sur l'intégration d'interventions préventives (détection et références à des ressources d’aide et de protection) dans ces services » (recommandation 18).

La deuxième demande spécifiquement au Collège « de sensibiliser davantage ses membres […] à la problématique de la violence conjugale, et ce, afin de mieux en détecter les signes, notamment le stress post-traumatique et les traumatismes physiques qui peuvent y être liés, et offrir les services nécessaires et appropriés aux victimes et leurs proches et aux agresseurs » (recommandation 20).

Formation et ressources

Au terme de travaux menés par le Collège avec l’Ordre des sages-femmes du Québec, l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec et l’Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec, les ordres recommandent à leurs membres de suivre la formation « Violence conjugale : connaître, détecter, intervenir », accessible gratuitement dans l’Environnement numérique d’apprentissage (ENA) provincial3.

Le Secrétariat à la condition féminine et l’INSPQ ont également publié plusieurs documents qui outilleront les professionnels afin d’identifier précocement les signes de violence conjugale et d’intervenir auprès des femmes, des hommes et des enfants.

Exceptions au respect du secret professionnel, lorsque requis

Dans certaines situations exceptionnelles, notamment en vue de prévenir un acte de violence, dont un suicide, le médecin peut faire exception au respect du secret professionnel4 (article 60.4 du Code des professions). Les alinéas 3 et 4 de cet article précisent que :

Le professionnel peut en outre communiquer un renseignement protégé par le secret professionnel, en vue de prévenir un acte de violence, dont un suicide, lorsqu’il a un motif raisonnable de croire qu’un risque sérieux de mort ou de blessures graves menace une personne ou un groupe de personnes identifiable et que la nature de la menace inspire un sentiment d’urgence. Toutefois, le professionnel ne peut alors communiquer ce renseignement qu’à la ou aux personnes exposées à ce danger, à leur représentant ou aux personnes susceptibles de leur porter secours. Le professionnel ne peut communiquer que les renseignements nécessaires aux fins poursuivies par la communication.

Pour l’application du troisième alinéa, on entend par « blessures graves » toute blessure physique ou psychologique qui nuit d’une manière importante à l’intégrité physique, à la santé ou au bien-être d’une personne ou d’un groupe de personnes identifiable.

Ainsi, en présence d’un risque sérieux de mort ou de blessure grave et dans un contexte d’urgence, le médecin peut prévenir les personnes en cause, y compris les autorités policières. Seules les informations requises pour assurer la protection de la ou des personnes menacées peuvent être communiquées. Le médecin doit documenter au dossier tous les éléments justifiant sa conduite, la date et l’heure des communications, le contenu de celles-ci et le nom des personnes avec qui il a communiqué.

Agir ensemble

La lutte contre la violence conjugale touche l’ensemble de la population, et tout particulièrement les professionnels de la santé, qui ont un rôle majeur à jouer pour contrer ce fléau. Faisons preuve de vigilance!


1 Définition tirée de : Gouvernement du Québec, Politique d’intervention en matière de violence conjugale: prévenir, dépister, contrer la violence conjugale, 1995, p. 23.
2 Pour en savoir davantage, consulter la « Trousse média sur la violence conjugale » de l’INSPQ.
3 Pour accéder à cette formation, les médecins travaillant en établissement peuvent se connecter sur la plateforme de l’ENA en inscrivant le nom de leur établissement et les accès nécessaires.

Les médecins qui ne travaillent pas en établissement doivent remplir ce formulaire. Ils recevront par courriel les informations nécessaires pour se connecter. Attention : lors de la complétion de ce formulaire, les médecins ne doivent pas utiliser une adresse courriel se terminant par @(x).gouv.qc.ca, @msss.gouv.qc.ca, @inspq.qc.ca ou @inesss.qc.ca.
4 Voir également les articles 19 et 19.0.1 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, qui prévoient que des exceptions similaires au secret professionnel s'appliquent en établissement.

Imprimer