La proche aidance : oui, mais à quel prix?

Survol des enjeux en proche aidance au Québec et des ressources pour les personnes proches aidantes.

La proche aidance est plus complexe qu’il n’y paraît. Non seulement interroge-t-elle les capacités individuelles à prendre soin d’une ou d’un proche en perte d’autonomie, mais elle questionne aussi la capacité de l’État et du réseau de la santé à reconnaître, à intégrer et à soutenir les personnes proches aidantes (PPA) comme les alliées indispensables qu’elles sont.

Texte publié le 28 octobre 2025

Bien que la proche aidance puisse être une expérience positive, la complexité et la grande diversité des enjeux qu’elle génère pèsent souvent lourd sur les personnes proches aidantes (PPA). C’est sans parler des nombreux défis que ce type de relation d’aide pose à la société en général et au réseau de la santé en particulier.

Il n’y a pas de PPA type. On retrouve des personnes proches aidantes dans toutes les tranches d’âge, même chez les enfants, qui doivent prendre soin d’un parent en difficulté. Toutes les situations d’emploi sont également représentées. Certaines PPA occupent un emploi à plein temps ou à temps partiel, d’autres sont retraitées ou encore aux études. Elles sont parfois célibataires, parfois en couple et font partie d’une famille traditionnelle ou reconstituée.

Un peu plus de 20 % de la population québécoise âgée de 15 ans et plus seraient des personnes proches aidantes.1 Selon les plus récentes données compilées, on estime que 49 % des PPA adultes ont 55 ans et plus et que, parmi les personnes se considérant comme PPA, 57,5 % d’entre elles s’identifient comme femmes.2

En dépit des disparités, ce que pratiquement toutes les personnes proches aidantes ont en commun, c’est qu’elles n’étaient pas préparées à assumer ce rôle lorsque la nécessité de dire « présente » est survenue dans leur vie. La plupart des PPA ne sont pas des professionnelles de la santé.

En fait, non seulement la majorité des personnes proches aidantes sont plus ou moins outillées au moment de se porter volontaires, mais elles n’ont souvent même pas le temps de se demander si elles veulent et si elles peuvent assumer cette responsabilité et, le cas échéant, pour combien de temps.

C’est le cas de nombreuses PPA qui ont répondu « présentes » quand il le fallait et qui, des semaines ou des mois plus tard, voyant la santé de leur proche se détériorer et nécessiter toujours plus de présence, d’accompagnement et de soins, se demandent combien de temps encore elles pourront tenir le coup.

Qu’est-ce qu’une personne proche aidante?

La perception de la proche aidance est grandement influencée par les a priori culturels. Par exemple, certains considéreront qu’il va de soi que des adultes prennent soin de leurs parents vieillissants ou qu’un parent prenne soin de son enfant lourdement handicapé et que la notion de proche aidance ne s’applique que si la personne aidée ne fait pas partie du cercle familial immédiat.

Il y a parfois un malaise à se reconnaître soi-même comme une personne proche aidante quand la personne aidée est son parent, sa ou son conjoint, ou encore son enfant.

Malgré cette impression que l’aide prodiguée dans un contexte familial va de soi et ne mérite donc aucune attention particulière, il n’en demeure pas moins que ce type de relation, qui mobilise la personne proche aidante de toutes les manières imaginables et parfois pendant de longues périodes, est encadré par plusieurs lois au Québec.

Entre autres, la Loi visant à reconnaître et à soutenir les personnes proches aidantes, adoptée en 2020 et mise à jour le 27 mai 2025, désigne comme personne proche aidante « toute personne qui apporte un soutien à un ou à plusieurs membres de son entourage qui présentent une incapacité temporaire ou permanente de nature physique, psychologique, psychosociale ou autre, peu importe leur âge ou leur milieu de vie, avec qui elle partage un lien affectif, familial ou non. »3

Cette reconnaissance légale des personnes proches aidantes, dont découle la Politique nationale pour les personnes proches aidantes (PNPPA), a ouvert de nouvelles perspectives en termes d’accès à des services, à des aménagements de conciliation travail/proche aidance, à des allégements fiscaux et à de l’aide financière.

Certains observateurs, dont les coauteurs de La proche aidance au chevet d’un système malade — Plaidoyer pour un Québec qui renoue avec ses solidarités, Gabriel Pelletier et Maude Pelletier-Smith, soulignent toutefois les limites tant de la loi québécoise que de la PNPPA dans leur analyse minutieuse de la proche aidance au Québec, mais reconnaissent que c’est un pas dans la bonne direction.

Suis-je une personne proche aidante ?

1. Est-ce que vous apportez un soutien à un proche qui a une incapacité ou des difficultés temporaires ou permanentes (physiques, psychologiques, médicales, sociales, dans l’organisation du quotidien, financières, etc.) ?

2. Est-ce que vous aidez ce ou ces proches pour une ou plusieurs des tâches suivantes :

  • Ses soins d’hygiène
  • Ses soins médicaux
  • L’entretien de la maison ou du terrain
  • Le transport
  • La gestion des finances
  • Faire les courses
  • Écouter les problèmes (offrir ou non des solutions)
  • Prendre des rendez-vous ou gérer l’horaire
  • Assurer sa sécurité (physique ou psychologique)
  • Autre

3. Est-ce que vous offrez ce soutien sans être payé et sans être reconnu à titre de bénévole par une organisation ?

4. Est-ce que vous sentez une responsabilité à l’égard du bien-être ou du rétablissement de la personne aidée (p. ex. : « Si je ne fais pas ces choses, la personne ne pourra pas les faire par elle-même ou n’aura pas accès aux ressources nécessaires pour trouver de l’aide ailleurs ou répondre à ses besoins »)?

Si vous avez répondu oui à l’une de ces questions, vous êtes très probablement une personne proche aidante.


Source : Gabriel Pelletier et Maude Pelletier-Smith, La proche aidance au chevet d’un système malade — Plaidoyer pour un Québec qui renoue avec ses solidarités, p. 74.

Une responsabilité qui n’est pas sans conséquences

La Loi visant à reconnaître et à soutenir les personnes proches aidantes précise que le soutien apporté par une PPA peut être continu ou occasionnel, à court ou à long terme, et être offert à titre non professionnel, de manière libre, éclairée et révocable, et reconnaît que cette aide peut « entraîner des répercussions financières pour la personne proche aidante ou limiter sa capacité à prendre soin de sa propre santé physique et mentale ou à assumer ses autres responsabilités sociales et familiales. »4

Rappelons-le, la proche aidance peut tout à fait être une expérience positive, comme le rapportent de nombreuses PPA. Mais dans bien des cas, le soutien offert à la personne proche constitue une sorte de double emploi, même s’il est occasionnel, qui vient avec son lot d’exigences, de contraintes et de répercussions autant financières, physiques qu’émotionnelles : sentiment d’incompétence, tristesse et impuissance face à une situation qui se détériore, culpabilité d’avoir envie d’arrêter, etc.

Les statistiques le confirment : 47 % des PPA disent se sentir fatiguées, 44 % se disent inquiètes ou anxieuses et 37 % se sentent débordées. La moitié des PPA éprouveraient des difficultés financières en raison de leur soutien à la personne aidée, une contribution qui peut aller jusqu’à 3000 $ par mois dans 10 % des cas.5

On peut persister dans sa croyance que la proche aidance est simplement un acte généreux et « naturel », restreint à la sphère privée, mais la réalité est que prendre soin d’une personne proche s’accompagne souvent d’un coût à la fois physique, matériel, financier et psychologique important.

Comme l’indiquent les auteurs Gabriel Pelletier et Maude Pelletier-Smith, les PPA « en arrivent parfois à avoir besoin de soins et de services importants à leur tour. Pourtant, les services pour assurer leur propre santé mentale, physique, sociale et économique avant que la situation ne dégénère sont peu, voire pas accessibles selon la région. »6

Trouver de l’aide

Qu’il s’agisse d’aide financière, de formation, de mesures fiscales ou de services de soutien pour la personne proche aidante ou pour la personne aidée (répit, aide à domicile, soutien psychologique et social, etc.), les informations sur les ressources relèvent soit du gouvernement fédéral, du gouvernement provincial, d’organismes communautaires ou de sociétés privées.

La majeure partie des programmes et mesures gouvernementales, fédérales et provinciales, ne s’appliquent pas spécifiquement aux personnes proches aidantes. Elles visent plutôt à pallier des difficultés engendrées par des situations particulières qui peuvent toucher l’ensemble de la population, par exemple la perte d’un emploi et la fin des prestations d’assurance-emploi. « La PPA se retrouve donc face à un panier de programmes disparates, provenant de deux paliers de gouvernement différents, qui peuvent ou non répondre à ses besoins et pour lesquels elle sera tantôt admissible, tantôt exclue. »7

Parmi les mesures de soutien financier et d’allégement fiscal dont peuvent bénéficier les PPA — moyennant leur conformité aux règles d’admissibilité — mentionnons le supplément pour enfant handicapé (SEH), les crédits d’impôt pour PPA (Québec) et pour aidant naturel (Canada), les prestations pour proche aidant d’un adulte malade, les prestations pour proche aidant d’un enfant malade et les prestations de compassion.

En ce qui concerne la formation, plusieurs organismes communautaires, universités et centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (CIUSSS) offrent des programmes courts ou longs, en ligne ou en présence, qui s’adressent aux personnes proches aidantes, mais aussi aux intervenantes et intervenants qui les accompagnent. Le site web de l’organisme l’Appui (voir ci-dessous) est un excellent point d’entrée pour trouver non seulement des programmes de formation, mais aussi une variété de services offerts aux PPA par région.

Pour tout autre type d’aide aux PPA (soutien psychologique, répit, groupe de soutien, questions juridiques, etc.), des organismes comme l’Appui ou Proche Aidance Québec (voir ci-dessous) sont des alliés précieux. Il est aussi possible de recourir à la ligne téléphonique 811 pour obtenir des conseils ou être dirigé vers les ressources appropriées.

Ressources

Liste partielle de ressources pour les PPA et pour les professionnels de la santé qui les accompagnent : 

L’Appui

Proche aidance Québec

Supplément pour enfant handicapé du gouvernement du Québec.

Crédit d’impôt pour personne aidante du gouvernement du Québec

Crédit canadien pour aidant naturel

Prestations canadiennes pour les familles et les proches aidants

Prestations de compassion du gouvernement du Canada

Répertoire des mesures et programmes d’aide financière pour les personnes proches aidantes du gouvernement du Québec

CIUSSS du Centre-Sud, Formation proches aidants — Personne atteinte de la maladie d’Alzheimer

Formation continue de l’Université de Sherbrooke, La proche aidance, développez les bonnes compétences, pour les professionnels de la santé qui accompagnent des personnes proches aidantes

Pour aller plus loin

Balado des proches aidants, produit par l’Appui

Éducaloi, Proche aidance, Guide pratique et juridique, 2023

Références

1. Gouvernement du Québec, Personne proche aidante
2. Gabriel Pelletier et Maude Pelletier-Smith, La proche aidance au chevet d’un système malade — Plaidoyer pour un Québec qui renoue avec ses solidarités, Montréal, Éditions XYZ, Coll. Réparation, 2025. p. 33.
3. Gouvernement du Québec, Loi visant à reconnaître et à soutenir les personnes proches aidantes
4. Ib.
5. Gabriel Pelletier et Maude Pelletier-Smith, op. cit., p. 54.
6. Ibid., p. 58.
7. Ibid., p. 146.

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