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82 messages ont été envoyés, tous opposés au projet de loi.

La responsabilité populationelle devait à la base être la raison d'être de Santé Québec pour avoir quelqu’un d’imputable pour la performance du système de santé.

Je ne crois pas que les médecins ont assez de pouvoir pour en être imputables.

Géneviève Gauthier, M.D.


Je suis médecin de famille au GMF-U Maisonneuve-Rosemont. Je suis très inquiète du projet de loi 106. J’enseigne aux résidents à soigner des patients et non à traiter des maladies. Soigner un patient prend du temps. Mes rendez-vous sont aux 30 mn, ceux des résidents sont de 30 à 60 mn selon le niveau de leur formation.

Je n’ai ni l’intention de faire une médecine pour traiter des maladies en 10mn ni l’intention d’enseigner une telle médecine. Je suis très inquiète pour la qualité des soins aux patients avec les indicateurs de performance du gouvernement.

J’espère que le Collège des médecins du Québec sera à la hauteur de la mission de protection du public qu’il défend.

Sarah Giraldeau, M.D.


Je suis désemparé.

Quand je pense à Alexandre de 9 ans qui voulait devenir médecin, les yeux pétillants, je ne réussis qu’à voir un Alexandre les yeux fatigués dans le miroir. Plein d’optimisme et de volonté, quand j’ai appliqué en médecine, c’était pour aider mon prochain, pour soigner les humains qui m’entourent et pour guider chaque personne au travers des maladies et des bons moments de leur vie. Après 3 ans et demi de pratique, je constate que j’ai probablement atteint mon objectif, mais qu’au passage je m’éreinte constamment, que j’ai probablement esquivé de justesse plusieurs burn-out, ou trouble d’adaptation dans le jargon médical. J’aime ce terme de trouble d’adaptation, car il correspond parfaitement à notre quotidien en tant que clinicien. Toujours s’adapter au rythme des changements incessants, jongler avec l’imprévisible, maitriser un déluge administratif de tâches, juguler les hémorragies d’un système qui s’écroule, pallier au manque de personnel, maitriser les abréviations qui s’enchainent, adopter de nouvelles obligations, changer celles-ci en cours de route, ouf! Oui, je réussis à aider mon prochain, mais au final je passe une quantité phénoménale de temps à m’adapter au gré des tempêtes et à remplir toujours plus de tâches administratives. Tout cela est un travail invisible aux yeux de plusieurs, principalement du gouvernement. Mais je le fais, par sentiment du devoir.

C’est le même sentiment du devoir qui était tant félicité par le gouvernement durant la covid-19. Les anges gardiens d’un système sur respirateur artificiel. Mais à l’aube des élections, je constate que la politique et sa fidèle démagogie reviennent plus rapidement que le prochain vaccin contre la grippe. Ce n’est pas mon premier gouvernement québécois que je vois aller. On clame toujours la même chose. Les médecins de famille sont paresseux, et insérer n’importe quel pourcentage choquant de médecin qui travaille juste 2-3 jours par semaine. Ces chiffres sont fallacieux. J’en vois très peu des médecins qui travaillent moins de 40h par semaine. Et ceux qui le font, ils ont de bonnes raisons (pré-retraite, retour de congé maladie ou maternité, implications dans toute autre tâche administrative, pédagogique et j’en passe). La seule constante qui unit tous les médecins que j’ai côtoyés dans ma pratique est leur dévotion pour leur patient et leur profession.[…] LE PL106 est un projet dangereux. C’est un projet, issu d’un gouvernement qui fait fi de ses comités d’experts. Étonnant, non, c’est la stratégie caquiste usuelle, regardez le 3e lien pour lequel aucun expert ne s’est prononcé en faveur. Alors pourquoi la CAQ écouterait son comité d’experts qui l’avise de ne pas adopter de critères de performance.

[…] De nous forcer à suivre ces critères de performance mènera nécessairement à une modification de ma pratique variée pour miser sur des rendez-vous à la chaine. Une estimation du temps que je devrais octroyer à mes patients après le PL106 mène à seulement 10 minutes ou moins par rendez-vous. Ces conditions de pratique sont incompatibles avec mes valeurs et avec les préceptes d’une pratique humaine qu’on m’a enseignés toute ma vie. Qui plus est, toutes mes tâches d’enseignement ne seraient pas prises en charge. Donc, lorsque je supervise 3-4 résidents dans une journée, pour le gouvernement, j’aurais pris une journée de vacances. Tant qu’à se faire dénigrer de la sorte, autant prendre une journée de congé pour enfin aller chez le dentiste ou le garagiste. Mais l’enseignement de la médecine, ça me passionne, tellement que j’en ai fait une maitrise. L’enseignement passionne également tous mes collègues, ce qui me fait peur, c’est d’entendre mes collègues qui comme moi, devrait arrêter d’enseigner à la future génération si le PL106 entrait en vigueur. Imaginer de nouvelles générations de médecins formés par ChatGPT et non pas des humains les formant à une pratique humaine.

Mais j’y crois encore en la médecine humaine. J’y crois en mes choix de prendre le temps, d’offrir toute mon attention et mon empathie. De laisser mes patients pleurer ou faire une attaque de panique dans mon bureau ou même de me parler de leurs projets les plus utopistes. J’ai envie de les accompagner dans tout cela. Mais la solution n’est pas dans les critères de performance. Le projet de loi ne reconnaît ni l’enseignement, ni la supervision, ni la contribution sociale, ni les soins complexes. Seulement le nombre de patients vus. Est-ce que soigner vite, c’est soigner mieux?

Le PL106 néglige plusieurs dimensions fondamentales :

  • Il ignore les recommandations des experts et des cliniciens du terrain.
  • Il centralise le pouvoir entre les mains du ministre, au détriment de l’autonomie professionnelle.
  • Il risque de détruire la médecine académique, car l’enseignement n’est pas valorisé.
  • Il fragilise les soins interdisciplinaires en forçant les médecins à délaisser des activités essentielles pour « rentabiliser » leur pratique.
  • Il pousse vers un modèle à la pièce, au détriment de la médecine continue et de proximité.

En voici quelques idées constructives :

  • Valoriser la diversité de pratique en médecine familiale
  • Valoriser et optimiser l’offre de service des IPS dans leurs domaines
  • Investir dans les professionnels en première ligne : ergothérapeutes, psychologues, physiothérapeute, travailleurs sociaux, infirmières en première ligne, orthophoniste, technicienne en éducation spécialisée et tant d’autres.
  • Rénover les infrastructures
  • Réduire la paperasse et les documents légaux et administratifs (ex : SAAQ, CNESST)

Ce ne sont pas des tableaux Excel qui vont sauver notre système de santé. Ce sont les soignants eux-mêmes, avec leur expertise, leur empathie, leur humanité.Je continuerai à me battre pour mes patients. Mais je suis désemparé. Désemparé devant un gouvernement qui semble croire qu’une société se gère comme une entreprise, où l’on mesure tout, sauf l’essentiel.

Alexandre Rolland-Dery, M.D.


Pour commencer : Rappelons-nous quelques-unes de nos responsabilités déontologiques :

7. Le médecin doit ignorer toute intervention qui ne respecte pas sa liberté professionnelle."

43. Le médecin doit s’abstenir d’exercer sa profession dans des circonstances ou états susceptibles de compromettre la qualité de son exercice ou de ses actes ou la dignité de la profession.

63.1. Le médecin ne doit adhérer à aucune entente ni accepter aucun bénéfice susceptible d’influencer son exercice professionnel tant au regard de la qualité des soins que de leur disponibilité et de la liberté de choix du patient.

Le projet de loi 106 est dangereux. Dangereux pour les patients, dangereux pour les médecins, dangereux pour notre système, notre système déjà brisé.

Tout d'abord, je crois qu'il va créer un exode des médecins. Les médecins sont fâchés, les médecins sont épuisés, les médecins n'en peuvent plus d'être la raison de tous les maux de notre système de santé. Si les 22% des médecins qui ont 60 ans ou plus quittent la pratique prématurément en raison de ce projet de loi, les conséquences vont être catastrophiques pour les patients.

Ensuite, le gouvernement veut désinscrire les patients qui sont inscrits et considérés « verts ». Je me permets une parenthèse pour dire que de qualifier nos patients selon une couleur comme à la SAQ est une pure lubie. Les codes de vulnérabilité actuellement en place avec la RAMQ ne représentent pas tout à fait la vraie vulnérabilité de nos patients. Certaines vulnérabilités n'appartiennent à aucun code et ces patients ne doivent pas être négligés. La relation médecin-patient que nous avons forgée au fil des années est précieuse. La confiance des patients en leur médecin de famille est très importante. Toutes nos études, nous avons appris à écouter, à comprendre, à individualiser nos approches. Le patient est unique, il mérite une approche unique. À force d'entendre M. Dubé parler des « bobos » des patients, je me demande à quoi il fait référence. Des éraflures? la dépression? La grossesse? M. Dubé et M. Legault veulent traiter les patients comme on produit des biens sur une chaîne de montage. C'est NON !

Limiter notre travail à une cible d'un nombre de rendez-vous démontre une totale incompréhension de notre quotidien. Lier notre rémunération au travail des autres est une insulte en soi. Ceci va diminuer la productivité de ceux qui sont productifs et ceux qui ne le sont pas n'y changeront rien. J'ai de grandes inquiétudes par rapport à la qualité des soins que les patients recevront dans des rendez-vous de six minutes. C'est le temps qui devra y être alloué à chaque patient si les exigences du gouvernement d'ajouter 2 millions de rendez-vous tiennent la route. Ne sommes-nous pas des travailleurs autonomes? N'est-il pas primordial de garder notre autonomie de pratique et de refuser de subir de l'ingérence dans la gestion de mes rendez-vous?

C'est un projet de loi dangereux qui démontre une incompréhension de la première ligne. Le budget octroyé à la première ligne est complètement insuffisant. La précarité financière des groupes de médecins de famille actuellement sera encore plus accentuée et la faillite de certains de ces GMF entraînera une perte d'accès.

Le collège doit protéger le public de cette loi qui nuira à notre profession, mais en premier lieu, nuira aux patients. Protégez le public, protégez-nous, protégez la profession. C'est assez!

Michèle Robichaud, M.D.


Je suis médecin de famille au Témiscouata depuis 18 ans. Dans les dernières années, nous avons perdu une vaste gamme de services dans notre hôpital: fermeture du laboratoire à 19h30, et même parfois à 16h, traumatologie redirigée vers Rivière-du-Loup, perte de services en radiologie, fermeture de lits, et fermeture intermittente du service d'obstétrique, plus de 50% des jours dans la dernière année. La majorité de ces fermetures sont dues à des manques de professionnels non-médecins (infirmiers, technologues).

Ceci rend notre travail beaucoup plus compliqué, et nous avons à gérer de l'administratif au lieu du médical. De plus, le manque d'exposition en obstétrique nous incite à aller faire du dépannage pour garder notre expertise, ce qui nous rend moins disponibles pour notre clientèle. Les nombreuses applications informatiques différentes alourdissent significativement notre travail à l'urgence plutôt que de le simplifier. Par exemple, je dois me connecter à au moins 4 systèmes différents, juste pour pouvoir servir les patients à l'urgence. Ces systèmes sont lents et non accessibles au chevet des patients. Pour certains, je dois me reconnecter pratiquement à chaque patient, ce qui entraine une énorme perte de temps dans une journée. Nous savons qu'il existe mieux, mais le CISSS n'a pas les moyens d'implanter des solutions efficaces.

Au bureau et à l'urgence, je vois une grande proportion de malades avec problématiques de santé mentale, qui n'ont pas accès à des services psycho-sociaux en temps opportun, et d'autres avec des problématiques musculosquelettiques qui n'ont pas accès à un physiothérapeute.

Au lieu de blâmer les médecins pour les problèmes d'accès, le gouvernement devrait travailler à améliorer l'efficacité à l'intérieur de ses installations, à former davantage de professionnels soignants (médecins, infirmiers/ères, technologues, physiothérapeutes, psychologues, etc.), et à fournir aux soignants le matériel et les plateaux techniques essentiels à leur travail.

De plus, les pénalités en lien avec l'efficacité vont selon moi à l'encontre de la déontologie, et je n'accepterai pas de réduire la qualité des soins pour en augmenter la quantité. La désinscription de patients non vulnérables pour inscrire davantage de patients vulnérables est aussi un non-sens. Qui sait quel patient « non vulnérable » présentera un problème de santé pour lequel il aura besoin d'un médecin? Comment le Ministre peut-il décider que ma patiente est « non vulnérable » parce qu'elle ne présente aucune des maladies prédéterminées par la RAMQ, alors que je la suis pour une blessure, un trouble d'adaptation, une grossesse, ou autre condition nécessitant des soins?

Les médecins de famille sont, contrairement à ce que le Ministre ne l'affirme, travaillants, dévoués et motivés à améliorer l'accès. C'est avec eux qu'Il devrait travailler, et non contre eux. Ce n'est pas d'un fouet dont nous avons besoin, c'est du soutien.

Catherine Caron, M.D.


En lien avec PL-106:

-les soins en 2e ligne, partout au Québec, reposent beaucoup plus sur les contributions des médecins omnipraticiens 24 heures/7 jours que la population et beaucoup de dirigeants ne le réalisent-les médecins omnipraticiens sont même demandés pour contribuer, souvent avec insistance, en CHU et dans d'autres milieux spécialisés.

-les activités en 1re ligne, en heures favorables et défavorables, reposent aussi sur ce même groupe médical

-ils dispensent des soins quotidiennement dans les salles d'urgence, en soins palliatifs, en hospitalisation, en pédiatrie sociale, en soins physiques en santé mentale; ils dispensent 80% des AMM, entre autres nombreuses sphères d'activités

-le PL-106, présenté publiquement de manière belliqueuse, risque de favoriser le départ de plusieurs de ces médecins hors de la pratique au Québec,

-ceci risque de déséquilibrer tous ou presque tous les secteurs de soins en 1re et 2e ligne en accès et en qualité, dans une ampleur difficile à estimer à court, moyen et long terme

-la population serait la grande perdante de ce projet de loi en accès et en qualité de soins pour plusieurs années

-les discours public et politique doivent basculer rapidement vers un ton respectueux et une recherche de solutions constructives, réalistes si le souhait est de garder le maximum de médecins omnipraticiens en activités chez nous.

La viabilité financière et la vigie sur la qualité du modèle sont importantes à examiner de manière complète et réaliste, car cela détermine si les milieux de soins, CLSC ou GMF, pourront exister à court et plus long terme de manière acceptable.

Viabilité financière:

a) Les CLSC, pour les activités médicales de première ligne, n’ont plus de budget dédié. Ils sont financés à même les budgets globaux CISSS et CIUSSS, donc dépendent de la situation budgétaire globale et des choix de leurs dirigeants. Le soutien clérical, nursing et professionnel de base est généralement minimal, ne permettant aucunement du roulement à haut volume.

b) Pour ce qui est des GMF, selon les facteurs influençant la rémunération des médecins, d’après nos informations, le modèle n’est pas viable automatiquement. Pour certains GMF, on prévoit déjà la faillite.

La population risque de se retrouver davantage qu’aujourd’hui dans les salles d’urgence, à plus forts coûts.

Qualité:

  • comment serait-il possible de fournir de stages dans des milieux cliniques appropriés pour les médecins le requérant?
  • comment le CMQ pourrait-il évaluer la qualité dans des milieux privés à débits élevés dont les propriétaires ne seraient souvent pas membres du CMQ?

Anonyme, M.D.


Je suis médecin de famille, enseignante, et hospitaliste depuis près de 6 ans. Mon commentaire principal au CMQ serait qu’il doit se positionner fermement et sans réserve contre ce projet de loi.

Voici pourquoi :

1.Ce projet de loi ne respecte pas les fondements mêmes de la médecine, c’est-à-dire la rigueur scientifique et l’action sur des faits prouvés par la science. Le gouvernement a mandaté un comité d’experts sur le sujet de l’accès aux soins et de l’organisation de la première ligne, mais il n’a pas pris en compte leurs recommandations. Le gouvernement fait preuve de mauvaise foi et semble agir davantage à des fins électoralistes plutôt que pour le réel bénéfice des patients. On dirait qu’il souhaite annoncer « sur papier » que tout le monde est pris en charge par un médecin de famille sans comprendre qu’il manque de médecins pour le faire. Le fait de simplement distribuer à chaque GMF les patients orphelins de leur secteur ne donnera pas plus d’accès et plus de soins de qualité aux patients! Le gouvernement ne semble pas voir que ce qui limite l’accès en ce moment, c’est la complexification du réseau; les dédales administratifs déshumanisants et inutiles auxquels on doit faire face pour octroyer des soins à nos patients. Le gouvernement se déresponsabilise ainsi totalement de toute imputabilité dans l’efficacité du réseau. Comme si l’accès aux soins ne passait que par les médecins… il élude du débat tellement de variables importantes! C’est tout simplement effrayant pour les soignants et pour les patients. Puisque vous êtes défenseurs des patients, vous devriez vous positionner contre les raccourcis intellectuels. Vous devriez encourager une réflexion honnête et réelle, basée sur les meilleurs systèmes de santé dans le monde et sur les recommandations d’experts.

2.Je donne des ateliers sur la santé mentale des médecins et je tiens à rappeler au CMQ que des soins de qualité passent d’abord et avant tout par des soignants en bonne santé mentale. Le CMQ se doit donc de prendre position dans le débat actuel ne serait-ce qu’en lien avec le harcèlement et la diffamation que les médecins subissent dans les médias et de la part du gouvernement. Un ministre de la Santé qui insinue que des médecins quittent leur garde à 16 h, laissant ainsi des patients sans soins? Quel mensonge! Ces assertions doivent être rectifiées! Autrement, les médecins du réseau perdront toute confiance en leur collège et ne le croiront plus quand il dira que la santé mentale des médecins est importante pour lui. De plus, advenant que le projet de Loi 106 passe, c’est la santé mentale de tous les médecins du Québec qui sera mise à rude épreuve parce que notre salaire sera directement lié à une performance que le réseau ne nous permet tout simplement pas d’accomplir. Nous sommes bien souvent impuissants par rapport à plusieurs indicateurs de performance dans le réseau! J’anticipe une vague d’épuisement professionnel et de départs à la retraite dans le contexte. Rien pour aider nos patients.

3.Le projet de Loi 106 est sexiste. En octroyant 25 % du revenu à des indicateurs de performance communs à un groupe, j’ai bien peur qu’on retourne 20 ans en arrière, où il était fréquent de voir une jeune femme médecin discriminée en entrevue en lien avec son statut éventuel de maman. Pensez-vous qu’une équipe de chirurgiens va préférer prendre un homme ou une femme qui devra possiblement quitter en congé de maternité, affectant ainsi le salaire de l’équipe? Pensez-vous qu’un GMF va préférer engager un homme ou une femme médecin qui a un potentiel de grossesse et donc, de perte financière pour le groupe? Le risque de dérive est grand. Aucun système de santé dans le monde n’applique ce genre de proportion à la performance collective dans le salaire, et ce, pour de bonnes raisons!

J’ai confiance que vous saurez vous positionner pour les patients, pour la rigueur intellectuelle, pour des réformes de la santé pérennes et réfléchies ainsi que pour la santé mentale de nos médecins. Car des médecins qui évoluent dans un système qui les respecte offriront nécessairement de meilleurs soins.

Pascale Thomas-Couture, M.D.


Je suis un médecin de famille et je suis préoccupé par l’avenir de la première ligne au Québec, je souhaite dénoncer avec vigueur le projet de loi n°106. Cette proposition
législative, loin de résoudre les défis criants du système de santé, constitue une approche
incohérente et punitive qui menace la qualité des soins et la sécurité des patients. En
tant qu’ordre professionnel chargé de protéger le public et de défendre les standards de
la pratique médicale, le Collège des médecins du Québec se doit d’agir pour contrer cette
dérive.

Le projet de loi n°106 impose une responsabilité collective aux médecins omnipraticiens
pour la prise en charge des patients, assortie de sanctions financières potentielles (article
38.0.15, Loi sur l’assurance maladie). Cette mesure est inutile, car elle ignore les causes
profondes de l’inaccessibilité des soins : une pénurie estimée à 1 500 médecins de famille,
des conditions de travail éprouvantes, et des disparités régionales criantes. Avec 2,1 millions de Québécois sans médecin de famille, dont 500 000 aux prises avec des problèmes
de santé modérés ou graves, il est absurde de blâmer les médecins, qui travaillent déjà à
pleine capacité, plutôt que de s’attaquer aux failles systémiques.

Plus troublant encore, ce projet de loi révèle un double standard flagrant dans le traitement des professionnels de première ligne. Les infirmières praticiennes spécialisées en
soins de première ligne (IPSPL) bénéficient de balises généreuses, avec 60 à 75 minutes
allouées pour une nouvelle prise en charge. Ces durées, justifiées par une approche globale, permettent des soins centrés sur le patient. Les médecins
de famille, qui partagent des responsabilités similaires, souhaitent adopter les mêmes
principes pour améliorer la prévention et la santé populationnelle. Pourtant, le projet de
loi les presse implicitement d’accélérer leurs consultations, sans cadre équivalent. Cette
disparité est non seulement injuste, mais elle compromet la qualité des soins, car des
consultations plus longues sont associées à de meilleurs diagnostics et à une meilleure
gestion des patients.

En pressant les médecins à augmenter leur débit, le projet de loi n°106 risque d’aggraver
l’épuisement professionnel et de provoquer des erreurs médicales, mettant en péril la
sécurité des patients. Ces conséquences, bien plus graves qu’un simple déséquilibre dans
la répartition des patients, menacent la stabilité même du système de santé. Des études,
comme celles sur le Quality and Outcomes Framework au Royaume-Uni, montrent que
les systèmes basés sur la performance réduisent le temps consacré aux soins personnalisés,
au détriment des patients.

Face à cette situation insensée, voici les actions que j'aimerais voir le Collège des médecins du Québec poser avec détermination afin de protéger le public ET la profession médicale :

1. De vous opposer publiquement au projet de loi n°106, en dénonçant son caractère punitif et son inefficacité à résoudre les problèmes systémiques.

2. D’exiger l’adoption de balises équitables pour les médecins, alignées sur celles des IPSPL, afin de garantir une qualité et une quantité de soins comparables.

3. De plaider pour des solutions systémiques, telles que l’augmentation des places en formation médicale et le renforcement des équipes interdisciplinaires complètes dans les Groupes de Médecine de Famille (GMF).

4. De lancer un appel à une étude indépendante des inefficacités du système de santé et de demander au gouvernement un engagement ferme à appliquer ses conclusions, contrairement à l’inaction qui a suivi le rapport des experts de la première ligne (Dr Groulx, Dre Boulanger et Mme Breton).

Le Collège a le devoir de défendre non seulement les patients, mais aussi les médecins, qui méritent un système de santé juste et sécuritaire. Nous croyons en la possibilité d’une collaboration constructive avec le gouvernement pour bâtir une première ligne forte, fondée sur le respect mutuel et des données probantes.

Cordialement,

Samuel Gareau-Lajoie, M.D.


Je pense sincèrement que ces mesures n'amélioreront pas les services de soins de santé et l'accès des patients. Il n'y a tout simplement pas assez de médecins pratiquant pour permettre de bons services et un bon accès aux patients au Québec. Rien de ce que nous faisons ou de ce que le gouvernement peut faire ne peut contourner ce simple fait.

Nous pouvons temporairement voir plus de patients en moins de temps pour donner plus d'accès à des rendez-vous courts, mais ce n'est pas du tout la meilleure façon de servir le public à long terme, surtout avec une population vieillissante et des patients de plus en plus complexes. Si nous retirons aux médecins de famille les tâches de deuxième ligne telles que les accouchements, le travail à l'hôpital et les soins d'urgence, qui les remplacera?

En outre, l'une des principales raisons pour lesquelles je ne peux pas augmenter ma pratique est que mes patients n'ont pas accès en temps utile aux soins spécialisés ou aux professionnels de la santé tels que les infirmières, les travailleurs sociaux, les psychologues, les physiothérapeutes et les ergothérapeutes. Les listes d'attente pour l'imagerie, les laboratoires, les examens et les consultations durent des mois, voire des années. Comme je ne peux pas les orienter facilement vers ces services et que la plupart de mes patients n'ont pas les moyens de se les offrir, ils reviennent me voir entre-temps et prennent plusieurs rendez-vous. Je fais de mon mieux, mais je ne peux pas être tout cela, même si c'est essentiellement ce que je fais en ce moment.

Je fais le maximum d'heures de travail que je peux faire sans m'épuiser, et c'est une charge à plein temps. Comment puis-je voir plus de patients en moins de temps sans m'épuiser et/ou abandonner mes patients? La solution réside dans la collaboration, dans l'augmentation du nombre de médecins et d'autres professionnels de la santé. Le fait de presser davantage les médecins n'aboutira qu'à des soins médicaux de qualité inférieure, où nous pouvons consacrer quelques minutes à un seul problème parce que nous n'avons pas d'autre choix, car nous sommes obligés de voir X patients par jour que nous ne connaissons pas. C'est ce que de nouvelles mesures entraîneront, car les médecins ne peuvent tout simplement pas faire plus que ce qu'ils font actuellement, sans sacrifier des soins décents pour les patients.

Odelia Borten, M.D.


Chaque personne devrait avoir un médecin mais il n’y a pas assez de médecin Il n’y a pas de ressources Il y a des lourdeurs administratives impensables

Je suis un médecin efficace, je vois entre 15-20 patients par jour. Je travaille tous les soirs ou presque pour finir mes notes, labos, et autres Je ne peux pas voir des patients en 10 minutes. Oui cela arrive pour des rdv urgences simples d’un patient que j’ai vu à plusieurs reprises dans l’année.

J’utilise chaque rdv disponible pour faire les examens préventifs nécessaires pour éviter des visites supplémentaires Je n’ai jamais limité mes rdv à 1 problème J’évalue le bien-être physique et psychologique des patients que je vois, Je suis capable de raccourcir les entrevues, je sais très bien aller à l’essentiel si je veux finir un rdv en 5 min, mais ce n’est pas ça soigner des gens Je vais rater qqch.

J’aimerais bien ne pas être psychologue et nutritionniste mais je n’ai pas le choix car pas de ressources. Et je traite comment mon patient déprimé si je n’ai pas de professionnel pour me soutenir. Je dois déjà me faire des listes de rappel pour rappeler aux patients de faire leur examen de contrôle. Mon rôle est lourd à porter, le CMQ doit s’interpose sur cette loi: elle est contraire à la déontologie. Traiter plus = traiter moins

Karèle Boudreau-Poissant, M.D.


Bien que je sois en faveur que la rémunération migre plus vers la capitation, je ressens certainement un désaccord sur les tarifs des visites associées au PL 106. Nous manquons cruellement de détails pour savoir précisément à quoi nous attendre, entre autres pour les gestes techniques complexes. Quelle est la classification de ceux-ci?

Pour ma part, je suis médecin installatrice de dispositifs intra-utérins avec un volume moyen à grand car j'ai une offre populationnelle à ce chapitre (100 installations/an). Le matériel requis et les frais de stérilisation nécessitent que l'acte soit tarifé en fonction du risque, de l'expertise requise et du coût pour le matériel requis. Si le tarif de 20 $ s'appliquait, de nombreux confrères abandonneraient la pratique. C'est à garder en tête pour maintenir l'accès des patientes à toutes les méthodes contraceptives. La situation est similaire pour les implants contraceptifs et les IVG médicales.

Même en ce qui concerne la performance ou les résultats, c'est honteux de ne pas connaître la teneur des cibles. En quoi les médecins doivent être pénalisés si leurs patients sont trop pauvres pour garder des saines habitudes de vie ou simplement trop précaires pour être observants à leur traitement et leurs rendez-vous?

Cette loi devient également délétère pour le public jusqu'à un certain point, car des départs de médecin sont à prévoir.

Son application pourrait affecter ma longévité en tant que praticienne active.

Andréanne Bonin-Carignan, M.D.


Je trouve aberrant que dans ce projet il ne fasse pas état des frais de bureau qui ne cessent d’augmenter d’année en année.

Je ne peux pas me permettre financièrement de perdre 25 % de mon salaire avec de tels frais.

Par ailleurs, nous tentons d’attirer des nouveaux médecins au sein du GMF où je travaille et ils sont tous freiné par ces frais.

D’autre part, si nous souhaitons améliorer notre performance, nous devons avoir des locaux adaptés, du matériel, une infirmière… Nous n’avons pas les moyens de nous offrir cela et le propriétaire à qui on sous-loue nos locaux n’a pas d’intérêt à investir. Nous sommes donc coincés.

Il n’est pas rare que lors de nos heures de bureau défavorable, nous n’arrivions pas à obtenir des prises de sang, des analyses d’urine pédiatrique, des rayons X et que nous devions rediriger les patients vers l’urgence.

Le manque flagrant de ressources a aussi un impact, pas d’accès à des physiothérapeutes, ergothérapeutes, inhalothérapeutes, travailleuses sociales dans des délais raisonnables et parfois pas du tout.

Je suis pour l’objectif d’un médecin pour tous mais pas à n’importe quel prix.

Étant kinésiologue de formation, mon ancienne profession commence à me faire de l’œil…

Jessica René, M.D.


Ceci va encourager le départ des médecins de famille du Québec, décourager la relève en médecine familiale, ne règlera rien vu que le problème est un manque de ressources physiques et humaines pour les médecins afin d'accomplir leur travail; le gouvernement n'a aucune obligation dans ce projet de loi; tout est arbitraire; c'est de la diversion pour camoufler leur gaspillage et leur incompétence. Personnellement, si j'étais médecin de famille, je quitterais le Québec; soyez assurés que le doctor-bashing empire toujours la situation; le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse doivent jubiler! Ils vont accueillir à bras ouverts les médecins qui voudront quitter le Québec. Et supporter ce projet de loi ne tient pas la route.

Michel Bérubé, M.D.


Encore comme avec la loi 83, la réponse du Collège est d’une grande timidité et sent la servilité face à la position gouvernementale, qui s’en sert souvent pour justifier ces positions. Mais avec la loi 106, on est vraiment face à une attaque frontale contre la profession médicale mais ultimement contre la population, l’autonomie professionnelle qui est pourtant la pierre angulaire d’une pratique libre d’influence de tiers est clairement mise à mal par ce projet de loi, entre autre. J’ose à peine imaginer la quantité de fonctionnaires que l’on devras engager pour gérer l’ensemble des mesures proposées. J’espère que le Collège aura le courage de dénoncer ce projet de loi qui diminuera l’attractivité de la profession médicale auprès des jeunes particulièrement pour la médecine familiale et qui ne fera qu’accentuer le désintérêt des étudiants en médecine pour celle-ci.

Yves Langlois, M.D.


Je vous écris avec un profond sentiment de tristesse et d’inquiétude face à la trajectoire actuelle que prend la pratique médicale au Québec. Médecin travaillant à la fois en milieu hospitalier et en groupe de médecine de famille (GMF), je suis confrontée à un choix déchirant.

La loi 106, qui a été conçue en faisant fi des conseils des experts mandatés, risque de transformer la pratique médicale en une prestation de services déshumanisés, à la manière d’un fast-food. Les cibles imposées sont irréalistes, particulièrement lorsqu’on travaille avec une clientèle vulnérable, majoritairement gériatrique, qui nécessite du temps, de l’écoute, et des soins personnalisés. La pression exercée par ces quotas menace directement la qualité des soins que je m’efforce de prodiguer avec rigueur et compassion.

Refusant de compromettre cette qualité, je me vois aujourd’hui contrainte d’entamer des démarches concrètes pour exercer ma profession dans une autre province, où l’on reconnaît encore le jugement clinique, le travail d’équipe, et la valeur du temps consacré aux patients. Il s’agit d’une décision difficile, mais rendue inévitable par le climat actuel de mépris et de surcharge administrative.

Je tiens à souligner que je ne ferme pas la porte à un retour au Québec. Toutefois, cela ne sera envisageable que lorsque notre gouvernement traitera enfin ses médecins — et par extension, sa population — avec respect, écoute et considération.

Caroline Boulos, M.D.


Les choix politiques et les prises de position récentes du gouvernement créent une détresse palpable chez les médecins de famille. Elle s’exprime publiquement sur les réseaux sociaux, mais aussi, plus discrètement, dans les conversations de corridor entre deux patients. Ce que j’entends et vis, c’est de l’incompréhension, un sentiment d’injustice, d’impuissance, de découragement, et même de peur, face aux menaces répétées des ministres Legault et Dubé.

Un certain degré de tension est normal et attendu dans toute négociation, notamment pour le renouvellement de l'accord-cadre. Toutefois, ce que nous vivons actuellement dépasse largement ce qui est sain et supportant dans ce contexte. Il s’agit d’un déséquilibre de pouvoir manifeste, soutenu par des projets de loi qui donnent l’impression d’une stratégie délibérée pour contrôler la pratique médicale, non pas dans un souci de réelle accessibilité à des soins de qualité, mais dans le but de produire des chiffres électoralement rentables et de s'assurer que les médecins n'aient pas de recours face à ces décisions.

Voici quelques exemples préoccupants de cette dérive :

1. Imposition sans réelle consultation

Les décisions sont prises unilatéralement, sans dialogue respectueux ni co-construction. Le refus persistant du gouvernement de recourir à un arbitrage neutre, malgré les demandes répétées de la FMOQ, témoigne d’un désintérêt marqué pour une collaboration authentique. Le gouvernement va même à l'encontre des recommandations de ses propres experts dans le dossier.

2. Mépris de la complexité clinique

Les indicateurs imposés ne tiennent pas compte de la réalité des patients ni de la variabilité clinique. La pression sur la productivité pousse à des soins plus rapides, plus fragmentés, générant une surutilisation des ressources (tests, imagerie, références), au détriment de la qualité.

3. Menaces de sanctions financières

L’imposition de cibles irréalistes, accompagnée de pénalités en cas de non-respect, revient à introduire une forme déguisée de coupure salariale. On exige l’impossible, puis on blâme les médecins. C’est une tactique de coercition et de manipulation.

4. Atteinte à l’autonomie professionnelle

On dicte aux médecins comment exercer leur profession, en écartant leur jugement clinique et leur expertise du terrain. Cette tendance, malheureusement bien installée, s’accentue dangereusement.

5. Stress chronique et perte de sens

La pression administrative, les quotas et les attaques médiatiques génèrent un climat toxique. Cela épuise les médecins, gruge leur motivation, et érode leurs idéaux de servir les patients avec humanité et dévouement.

6. Instrumentalisation politique du système de santé

Les médecins deviennent des boucs émissaires commodes pour justifier des décisions politiques à court terme. On tente de manipuler l’opinion publique pour faire passer des projets de loi abusifs, faute de réels moyens de pression du côté médical.

7. Déresponsabilisation de l’État

Plutôt que de s’attaquer aux vrais problèmes — manque de ressources, lourdeur bureaucratique, effectifs insuffisants pour répondre aux besoins de la population —, le gouvernement rejette la faute sur les médecins. Or, c’est précisément parce que l’État détient un pouvoir immense qu’il doit être redevable de ses actions.

À titre personnel, je vis cette situation avec un sentiment profond d’impuissance, d'anxiété, et de désillusionnement. Ces projets de loi me font perdre le sommeil. J’en viens à désespérer : quand aurons-nous un gouvernement composé de véritables collaboratrices et collaborateurs, capables de bâtir des solutions durables, et non de manipuler des chiffres pour des gains électoraux?

Nous avons besoin de votre aide, au CMQ, pour rendre visible cette utilisation malsaine du pouvoir. Le gouvernement doit être tenu responsable de ses dérives, car elles compromettent la qualité des soins offerts aux Québécois. Le Collège, en tant qu’organisme de protection du public, a le devoir de dénoncer ce qui nuit à la sécurité et à la pérennité des soins.

J’espère que vous pourrez adopter une position ferme sur la nécessité de rebâtir une relation saine entre le MSSS et les médecins. Il est inacceptable qu’un premier ministre clame « Ça va brasser » comme si c’était une qualité. Le Québec mérite mieux. Il mérite des leaders respectueux, intelligents, capables de créer des ponts durables.

Jean-François Stephan, M.D.


J’ai près de 50 ans de médecine très active; je désirais continuer. A faire des soins de fin de vie; qlqs VAD etc., à un rythme plus cool! J’ai eu jusqu’à l’an dernier près de 3 000 patients inscrits et surtout gériatriques!

Ce que j’ai vu et entendu de Messieurs Legeault et Dubé m’a profondément dégouté et le 1er juillet, je vais me retirer

Robert Gagnon, M.D.


Je suis médecin de famille. J'aime mon travail, j'aime mes patients, j'aime enseigner à la relève en médecine.

J'ai choisi la médecine familiale par passion. À chaque année, ma motivation diminue. Je regarde de plus en plus sérieusement d'autres options de carrière. Il est urgent que le ton du gouvernement change. Il faut que le Collège soit solidaire. Notre autonomie est en jeu. Nous défendons quotidiennement les patients dans le système. Le Québec n'a pas les moyens de se priver des médecins de famille.

Je ne veux pas que ça brasse. Je veux que ça marche.

Elise O'Carroll, M.D.


Je tenais à donner mon avis concernant les blocs opératoires et les possibles liens entre la performance et la rémunération des médecins spécialistes. Quand on lit que le gouvernement voudrait que 99% des patients soient opérés dans un délai d'un an et que 25% de la rémunération y serait liée, je considère que c'est ne pas être au courant de la réalité.

Je suis anesthésiologiste depuis 18 ans dans un milieu de soins intermédiaires qui offrent les spécialités chirurgicales de base: chirurgie générale, urologie, gynécologie, orthopédie, chirurgie dentaire et maxillo-faciale, ORL. Nous n'avons jamais réussi à revenir à notre fonctionnement pré-pandémie à cause de la pénurie d'infirmières. Plus de la moitié de nos infirmières sont en congé de maladie prolongé. On doit jongler avec des salles coupées, des arrêts pour dîner. Il serait temps que le ministre arrête de dire que la pénurie d'infirmières est réglé parce qu'il a augmenté leur salaire et fait revenir des infirmières du privé. La formation d'une infirmière pour travailler dans un bloc opératoire prend de 4 à 6 semaines. Plusieurs sont formées et ne restent pas. Il y a des départs à la retraite et de nombreux congés de maladie. Celles qui restent sont à bout de souffle. Nous avons passé proche d'un bris de service pendant 3 fds récemment à cause de la pénurie d'infirmières. Que faut-il de plus pour que le ministre comprenne que ce qui ralenti les blocs opératoires n'est pas les chirurgiens, ni les anesthésiologistes et que l'horaire d'un bloc opératoire n'est pas fait en fonction du chirurgien, mais en fonction des heures de travail des infirmières? Je sais que nous ne sommes pas le seul milieu aux prises avec une pénurie de personnel. Quand ce n'est pas les infirmières qui sont en pénurie, ce sont les inhalothérapeutes. Le manque de médecins deviendra peut-être un problème avec son projet de loi, car nous avons déjà un collègue anesthésiologiste qui quitte la profession médicale ce mois-ci pour se réorienter dans un autre domaine.

Josiane Léveillé, M.D.


J'ai 39 ans et je pratique en Outaouais, j'ai une pratique polyvalente (hospitalisation 1 semaine sur 4) et prise en charge de plus de 1200 patients. Je m'oppose au PL 106

Ce qui m'inquiète le plus de mon côté à propos de ce projet de loi, c'est de devoir quitter l’hospitalisation pour me concentrer sur la prise en charge de patient afin de viser les cibles de performance. Le problème c'est qu'il y aura un bris de service à l'hospitalisation si je quitte.

Pour ma part, la pratique hospitalière est déjà moins payante que la pratique au bureau. Je connais beaucoup de médecins qui ont une pratique polyvalente et qui devront faire des choix et malheureusement, ceci favorisera un exode des médecins qui travaillent en établissement vers la pratique au cabinet, dans une région où nous avons déjà des problèmes de recrutements et de maintien des effectifs en établissement.

Jean-François Simard, M.D.


Je suis médecin de famille depuis 2007 dans la région de Sherbrooke. Dans le GMF où je pratique, je suis près de 1600 patients, dont plus de 800 sont vulnérables.

Dans les derniers mois, la FMOQ se bat corps et âmes pour tenter d'améliorer l'image de la médecine de famille, pour faire en sorte d'assurer la pérennité de la profession. L'image des médecins est continuellement et constamment tabassée sur l'espace public, tant par les médias que par notre employeur, le gouvernement. Le projet de loi 106 est, à mon sens, un outrage total non seulement à la mission d'un employeur d'offrir des conditions de travail saines et justes pour ses employés, mais envoie aussi un message totalement négatif à tous les médecins de famille et futurs médecins de famille du Québec.

Le collège est assurément au courant du fait que de nombreux postes ne sont pas pourvus dans les facultés de médecine pour la spécialisation en médecine de famille. Tout le monde le sait, la situation est de pire en pire à chaque année. Un tel projet de loi, ajouté à l'amendement sur la loi 11, n'est qu'un clou de plus dans le cercueil de notre belle profession. Plusieurs de nos médecins sont passionnés, travaillent à tous les jours dans un système où non seulement la bureaucratie freine la capacité à soigner de façon adéquate, mais aussi où les structures et appareils sont d'une vétusté à faire rougir les pays en voie de développement (pensons seulement à HMR ou l'hôpital Sainte-Croix à Drummondville). Plus de 25-30% des médecins de famille au Québec ont plus de 65 ans. Ces derniers continuent à œuvrer dans ce climat de travail plus que toxique et se voient ajouter cette loi complètement absurde. Que pensez-vous qu'il va se passer? La retraite officielle pour plusieurs...

Ce que le gouvernement fait avec cette loi, c'est de replacer les chaises sur le pont du Titanic alors qu'il est en train de couler. Le feu est pris dans le système et le gouvernement, au lieu de tenter de l'étendre, amène des guimauves... Il se rit des professionnels sur le terrain qui doivent, jour après jour, composer avec un système souvent plus malade que les gens qui l'utilisent.

Si ce projet de loi devient une loi officielle, ça sera la fin de notre profession telle que nous la connaissions. La médecine de famille ne sera plus une profession où le bien-être des patients passera avant tout. Ça ne sera plus une profession où nous prendrons le temps de bien faire les choses et de faire de la prévention, de comprendre nos patients, de les accompagner dans leurs besoins. Non. Ça deviendra une médecine de performance. Une médecine de rendez-vous à 1 problème. Une médecine de 8 minutes. Un fast-food...

François Roy, M.D.


Je sollicite le Collège des médecins afin de rappeler au gouvernement que l'application du PL 106 tel que publié cette semaine est contraire à notre Code de déontologie. Il sera impossible d'effectuer une médecine de qualité avec les contraintes suggérées. Sans parler de l'atteinte à notre liberté professionnelle (article 7), du règlement qui nous demande de ne pas participer à une action de nature à mettre en danger la santé ou la sécurité d'une clientèle ou d'une population (article 13). C'est toute la population qui sera perdante. Je devrais donc m'abstenir d'exercer ma profession dans ces circonstances susceptibles de compromettre la qualité de son exercice ou de de ses actes ou la dignité de la profession, tel que l'article 43 le nomme.

Marie-Michèle Livernoche, M.D.


Le ministre Dubé voudrait saboter sa réforme qu’il ne ferait pas mieux.

Grave manque de jugement de tenir la profession médicale du manque de ressources humaines pour pouvoir rendre plus efficace le travail des médecins. Le meilleur des menuisiers ne peut être vraiment à la hauteur s’il n’a pas d’assistant ou pire, manque d’équipements essentiels.

Autre manque de jugement : penser qu’on peut vraiment reformer le système sans la collaboration des principaux responsables des changements nécessaires.

On apprend donc rien des échecs répétés du passé.

Jean-Claude Bergeron, M.D.


Vous nous demandez notre avis sur l’impact du projet de loi 106.

1. Qualité de l’exercice : À tenter d’offrir des soins à tous avec les mêmes ressources, il faut s’attendre à une diminution de la qualité des soins. Si je ne suis pas capable de revoir un suivi de dépression avant 2 mois parce que mon horaire est plein, le rétablissement et le retour au travail seront certainement affectés. Par contre il y aura une certaine justice. Tout le monde aura accès aux même soins médiocres.

2. Accès de la population aux soins : Le gros problème. Nous ne réussirons pas à atteindre les objectifs du gouvernement. Après tout, comment arriver à plus avec les mêmes ressources. Ce n’est pas en frappant sur les poules qu’elles donnent plus d’œufs! Donc les revenus des médecins baisseront de 25%. Pour un médecin de famille, passer d’un revenu moyen de 266k à 200k. En déduisant les frais de bureau qui sont souvent de 40k par année, on se rapproche drôlement du 130-150k par année qu’on voit offert aux IPSPL dans leurs offres d’emploi. La médecine familiale est déjà très peu attractive, ce sera probablement le coup de grâce. D’ailleurs je me permets de pousser la comparaison. IPSPL à 150k par année sans frais de bureau, qui travaille principalement en heure de semaine, peut aller où elle veut n’ayant pas de processus de PREM, n’ayant pas l’obligation de faire des gardes (pas d’AMP), n’ayant pas l’obligation d’inscrire des patients non plus. N’ayant pas à faire de santé mentale (25% de mes suivis). Un salaire, des semaines de vacances, une retraite! Ah oui j’oubliais, l’opinion publique favorable en plus, plutôt qu’être les gros méchants du système de santé, elles sont l’espoir et l’avenir! J’ai entendu des collègues qui se demandaient si on pourrait se faire reconnaître une équivalence de diplôme IPSPL pour pouvoir appliquer sur leurs offres d’emploi. Ça donne à réfléchir. Bref, j’ai hâte de voir après quelques années avec un projet de loi comme celui-là en place à quoi ressembleront le nombre de postes vacants en médecine familiale.

3. Point fréquemment oublié qui s’applique principalement à Montréal. Le gouvernement tiendra-t-il compte dans ses savants calculs de performance toute la population non assurée à qui on se doit également d’offrir des soins? Assurément si on passe une demi-journée à facturer la Croix bleue, on pourrait croire qu’on ne travaille pas. Selon moi le CMQ considère tout de même ces personnes comme des êtres humains ayant droit à des soins... Point plus régional : Même chose quand je ne fais que remplir un formulaire de SAAQ, ou un formulaire de crédit d’impôt, d’assurance invalidité. Toute ces choses qu’on fait parce que nos patients en ont besoin mais ne sont pas facturées à la RAMQ. Quelle grande perte d’efficacité aux yeux du gouvernement.

Mathieu Flamand, M.D.


Je pense que l’état veut fonctionnariser les médecins mais l’état a peur des résultats malheureux et inadéquats. Il veut donc donner la responsabilité aux médecins sans donner l’information ni les moyens. Aucun fonctionnaire ne connaît le travail du médecin. Les patients ne sont pas des numéros et les médecins ne sont pas des pions. On ne peut pas gérer notre travail comme on gère celui d’un fonctionnaire…dans notre cas tout doit être flexible et ce dans un climat de confiance et de liberté.

Jean Rodrigue, M.D.


Le PL 106 va trop loin. Il est un fantasme irréaliste. Jamais 100% de québécois n'auront un médecin de famille

1-pcq certaines personnes ne veulent tout simplement pas d'un médecin à ce moment de leur vie.

2- Il manque 1 500 médecins de famille dans le Québec. Et les 60 ans de gouvernance précédentes ont « oublié » d'actualiser le vieillissement de la population et d'arrimer le nombre de MD famille requis pour atteindre leurs chiffres-fantasme de 100% et ce dès les années 80.

3- Pcq il n'y a plus assez de garçons admis en médecine, et que les grossesses-conciliation famille/travail ne concordent plus avec les besoins abyssaux de la médecine en 2025. Les garçons ne tombent jamais enceinte et ne partiront jamais aussi longtemps de leur pratique; il serait bien temps de faire de la discrimination positive et bâtir un contingent 50-50 composée de filles et garçons.

4- Pcq je ne peux/veux plus donner plus pour ma profession et conserver la même qualité de soins car ma santé mentale en paiera le prix.

5-Pcq l'augmentation de la quantité de services à donner aux patients sera soumise à la même demande de qualité de soins de la part du Collège et en cela il y aura une rupture potentielle entre les 2 demandes, et je serai imputable comme on peut s'y attendre.

6-Oui, il est vrai que les patients verts seront les laissés-pour-compte d'un tel code de couleurs quoiqu'en disent les politiciens qui font de la politique avec la santé

Quand est-ce qu'on sortira le politique de la santé ?

Claude Lavallée, M.D.


Je suis contre ce projet de loi. On ne peut pas demander aux médecins de lier leur rémunération à des indicateurs de performance dans un contexte où on ne peut leur assurer les ressources pour le faire. Les problèmes d’accès sont complexes et multifactoriels.

Johanne Rioux , M.D.


J’ai juste lu 8-9 pages et ça risque d’être drôle! J’ai hâte de voir la position du CMQ!

1- le DTMG va repartir les patients d’un territoire aux cliniques selon la capacité du milieu à les prendre en charge! (c’est quoi la capacité max d’un milieu?)

Chez nous à Dolbeau, Il y a 5-6 ans il n’y avait personne sur la liste d’attente au guichet. Maintenant avec les départs à la retraite non comblés c’est 55 % de la population qui sera orpheline au 1er juillet. Encore 5 Md de plus de 62 ans dont 2 de 72!

Maintenant, si le gouvernement veut que j’inscrive les 10 000 patients à moi tout seul, pas de problème! Je ramasserai le cash!

Mais entre vous et moi, à part de belles statistiques pour le ministère, cela ne permettra pas aux patients d’avoir un accès et de me voir. Ceux que j’ai n’y arrive pas!

2- un patient qui quitte le territoire se trouve désaffilié… donc mon patient déménage à Québec, il cesse d’être mon patient!

Dans un sens je peux être content, j’aurai de la place pour en prendre un autre, mais bonjour le lien thérapeutique! Qu’en pense le CMQ?

3 -derniers points.

Il faudrait que quelqu’un ait le courage de dire que les 2 500 Md dit paresseux sont des femmes en congé de maternité, des pères en congé de paternité, des Md en début et en fin de carrière et des congés de maladie. Il y en a probablement une ici et là qui travaille à demi-temps, mais avec le paiement à l’acte, si tu fais 1/2 de mes actes tu vas avoir un salaire 1/3 du mien car les frais de bureau ne changent pas.

J’avais pensé prendre ma retraite le 31 mars 2027 et garder mon permis de pratique encore un an pour gérer certains rapports d’examens et quelques dossiers complexes même si mes patients seraient désinscrits!

Avec la loi d’hier, oubliez ça! Cela donnerait un cas de Md paresseux au ministre!

Je vais travailler full pin ad le 31 mars 2027 18h00!

Martin de la Boissière, M.D.


1. Je quitterai le Québec si le plan est mis en œuvre. Les soins longitudinaux sont au cœur de la médecine familiale et c'est la raison pour laquelle je la pratique. Avoir l'équivalent d'une clinique sans rendez-vous où nous avons 50 000 patients pour 10 médecins et où vous voyez quelqu'un de différent à chaque fois est une mauvaise médecine qui passe à côté de l'objectif de la médecine familiale. Parce que j'ai vu le patient lors de la visite médicale de son enfant à l'âge de 4 ans, il s'est senti à l'aise pour que je vérifie ses oreilles lorsqu'il était malade et il s'est senti en sécurité pour me parler des abus qu'il avait subis à l'âge de 12 ans. Ils sont venus me voir en toute confiance pour leur contrôle des naissances et leur suivi de grossesse.

2. Nous n'avons tout simplement pas les ressources nécessaires pour faire ce qu'ils proposent. À Gatineau, il faut attendre six mois pour voir un physiothérapeute financé par l'État. La psychologie financée par l'État n'existe même pas. Les professionnels de notre GMF ne sont pas remplis de façon chronique. Si je demande aux archives une copie d'un rapport, il faudra 9 mois à l'hôpital pour me l'envoyer. La transcription des rapports de radiologie prend une semaine.

3. L'exode massif que ce plan paralyserait le système de santé et aurait des répercussions sur les années à venir qui pourraient ne jamais être réparées. Déjà, tous les groupes Facebook de mes médecins affichent des messages de médecins, de médecine familiale et de spécialistes qui envisagent de quitter le Québec. Pourquoi quelqu'un voudrait-il travailler au Québec avec un environnement de travail draconien pour 25-50% de moins que ce qu'il est payé ailleurs. Forcer les nouveaux médecins à devenir des serviteurs sous contrat avec une obligation de 5 ans de travailler au Québec ne tiendra pas devant les tribunaux.

Jennifer Mitton, M.D.

Note : Ce texte a été traduit avec un outil d’intelligence artificielle.


Ça suffit. Il est temps de faire grève.

J. Graham Pratt, M.D.


J’ai presque 35 ans de pratique Je suis médecin de famille en GMF-U. Je suis inquiète de l’avenir de l’enseignement qui semble oublié dans ce projet de loi.

Déjà non valorisé, l’enseignement sera probablement la première activité sacrifiée par les médecins qui devront bien couper quelque part dans leurs activités professionnelles afin de rencontrer les exigences du gouvernement

De plus, j’avoue que dans ma pratique, je vois un patient aux 30 minutes, et ce, pour plusieurs raisons:

1) pour qu’il ne revienne pas dans une puis deux semaines pour des problèmes que je n’aurai pas eu le temps de régler.

2) pour prendre le temps de créer une alliance thérapeutique, ce qui est prouvé pour améliorer l’adhésion des patients à leurs traitements.

3) pour établir une communication efficace et répondre à toutes les questions des patients.

4) pour maximiser mon questionnaire et examen physique afin de diminuer les coûts de santé en demandant moins de tests quand c’est possible et moins de consultations en spécialité aussi lorsque c’est possible

Si je pratique selon ce qui semble être des lignes directrices de soins gouvernementaux, je vais coûter beaucoup plus cher à la société car :

1) les patients vont être obligés de revenir reconsulter pour des problèmes non réglés (10 minutes par patient)

2) c’est sûr que pour éviter des plaintes je vais rapidement référer en spécialité et demander plus de tests (10 minutes par patient…)

3) les patients risquent d’être moins satisfaits en général des soins reçus.

D’autres solutions existent et je pense que c’est par l’augmentation du nombre de médecins que nous pouvons y arriver. Ce problème serait réglé à l’heure où l’on se parle s’il y avait eu augmentation importante des cohortes d’étudiants il y a 10 ou 15 ans…

Je pense prendre ma retraite du bureau 4 ou 5 ans plus tôt que prévu!

Il n’y a plus de jus dans le citron !

Dominique Archambault, M.D.


Un exode massif de médecins s’annonce en raison de la loi, qui dévalorise le patient.

Notre pénurie sévère de md ne fera que se rempirer.

Svp ayez le courage d’opposer ce projet de loi pour la sécurité des patients

Sarina Lalla, M.D.


Je vous écris aujourd’hui non pas seulement comme médecin de famille, mais comme professionnelle profondément préoccupée par l’orientation que prend notre système de santé.

Le projet du gouvernement du Québec de lier une part significative de notre rémunération – jusqu’à 25 % – à des indicateurs de performance collectifs soulève de sérieuses questions éthiques et déontologiques.

Comme vous le savez, la pratique médicale ne peut être guidée par des cibles comptables, mais bien par la rigueur clinique, l’indépendance professionnelle et le jugement individualisé envers chaque patient. En imposant des quotas déconnectés de la réalité du terrain et en introduisant une logique de sanction financière, le gouvernement met en péril notre capacité à respecter notre Code de déontologie.

Voici quelques-unes des contradictions fondamentales que cette réforme engendre :

• Le conflit entre rapidité et qualité des soins : En nous incitant à augmenter le volume de patients vus, on nous pousse à réduire le temps consacré à chacun. Or, le Collège nous rappelle que chaque patient mérite une évaluation complète, sans compromis sur la qualité.

• L’iniquité entre milieux de pratique : Les médecins travaillant dans des milieux sous-dotés ou auprès de clientèles vulnérables seront pénalisés pour des facteurs systémiques hors de leur contrôle. Est-il acceptable, sur le plan déontologique, de lier notre rémunération à des résultats collectifs inégaux?

• Le risque de glissement de responsabilités : Faute de personnel, de soutien administratif ou de ressources psychosociales, nous sommes forcés de compenser des lacunes structurelles. Devons-nous en plus porter la responsabilité financière de ces défaillances?

• La pression indue sur notre jugement clinique : Devra-t-on prioriser les cas simples pour « performer » selon les critères du ministère, au détriment des patients complexes, chroniques ou en détresse?

Le Collège a pour mission de protéger le public, notamment en s’assurant que les médecins exercent dans des conditions permettant une pratique conforme à leur déontologie. Or, cette réforme va à l’encontre de ces conditions. En tolérant, voire en normalisant une culture de performance fondée sur des cibles arbitraires et en grande partie hors de notre contrôle, on compromet la qualité des soins et la relation médecin-patient.

Nous sommes nombreux à craindre que cette réforme, si elle est implantée sans opposition claire, mène à une médecine à deux vitesses : rapide pour les patients « rentables », expéditive ou inexistante pour les autres. Ce n’est pas cette médecine que nous avons prêté serment de pratiquer.

En conséquence, je vous invite, en tant qu’ordre professionnel, à prendre position publiquement sur cette réforme. À rappeler, fermement, que le rôle du médecin n’est pas de répondre à des quotas, mais à des humains. À défendre l’intégrité de notre jugement clinique et la dignité de notre profession.

Car si le Collège ne prend pas la parole maintenant, quand les fondements éthiques de notre pratique sont menacés, qui le fera?

Annie Lacombe, M.D.


J'ai peur que l'adoption du PL 106 implique une médecine moins humaine et de moindre qualité pour des citoyens qui méritent toute notre attention et notre savoir-faire.

Andréanne Grégoire-Auger, M.D.


Les mesures coercives de notre gouvernement envers les médecins de famille doivent cesser!

Ce n’est pas de cette façon que l’on arrivera à retenir plus de MDs au Québec… Nous faisons de notre mieux et avons tous et toutes des enjeux personnels ou de santé qui limitent souvent nos disponibilités et nos horaires!

Anna Bedkowska, M.D.


Je tiens à exprimer mon opposition ferme au projet de loi no 106, qui propose de lier la rémunération des médecins à la performance, au détriment de la qualité des soins. La médecine ne doit jamais être réduite à une logique de rendement. Une approche centrée sur la performance risque de compromettre gravement la qualité des soins et la sécurité des patients.

On ne soigne pas une dépression, un trouble bipolaire, un infarctus, un AVC, ni n’évalue un trouble neurocognitif ou les facteurs de risque cardio-vasculaires en 10 à 15 minutes. Ce type de soins nécessite du temps, de l'écoute, un raisonnement clinique approfondi et un enseignement adapté. En imposant une logique de volume, on met en péril la relation de confiance entre médecin et patient, ainsi que la rigueur du processus diagnostique et thérapeutique.

De plus, déléguer à des fonctionnaires non formés l’évaluation de conditions médicales est dangereux. La littératie médicale de la population ne permet pas toujours une autoévaluation fiable, ce qui pourrait entraîner des erreurs, des complications, voire des décès. Les médecins ne devraient pas porter le fardeau des conséquences d’une mauvaise gestion systémique dont ils ne sont pas responsables.

Le Collège des médecins, dans son rôle de protecteur du public, doit dénoncer avec force l’intimidation croissante des médecins de famille par le gouvernement et mettre fin au climat de doctor bashing. Ce climat délétère entraîne un désengagement des médecins du réseau public, une perte de motivation, et un désinvestissement grave dans leur rôle. Il est urgent que le Collège fasse reconnaître que la dégradation du système de santé est la conséquence de décennies de mauvaise gestion politique, et non de l’incompétence des soignants.

Nous tenons à bout de bras un système déficient depuis des années. Aujourd’hui, plusieurs collègues envisagent sérieusement une réorientation de carrière pour quitter définitivement le réseau de santé québécois. Cette hémorragie de ressources humaines qualifiées aura des conséquences catastrophiques sur l’accès aux soins.

Le Collège a le devoir d’agir maintenant. Il doit défendre la population contre les abus du gouvernement avec fermeté et s’opposer à toute réforme qui compromettrait encore davantage la pratique de la médecine de qualité au Québec. Le temps presse : si rien n’est fait, c’est l’effondrement du système que nous risquons.

Je suis une médecin qui aime profondément la médecine. Je m’implique chaque jour auprès de mes patients avec dévouement, sans compter mes heures, et cela, mes patients me le reconnaissent quotidiennement. Je suis aussi investie dans mon milieu et dans l’enseignement des étudiants en médecine. Mais je suis épuisée. Et devant le manque de respect du gouvernement envers ma profession et l'importance d'une médecine de qualité au Québec, je réfléchis moi aussi sérieusement à quitter la médecine. Car je n’accepterai jamais de pratiquer une médecine de performance qui compromettrait la santé et la vie de mes patients.

Marjorie Ayotte, M.D.


[…] on va se souhaiter un gouvernement qui comprend les enjeux et qui accepte la collaboration des médecins pour améliorer l’offre de service pour soigner les Québécois…

Normand Gravel, M.D.


Aujourd’hui vendredi 9 mai ma priorité opératoire en chirurgie orthopédique à Chicoutimi a été coupé par manque de personnel. Et quand je veux ajouter des plages de clinique externe dans des cases libres, la première réponse est toujours : « manque de personnel » … et j’insiste gentiment et réussi parfois! Je suis très déçu de l’approche coercitive du gouvernement. Une approche positive avec une oreille à l’écoute des besoins réel des gens en place aurait plus de chance de succès. […] Les gens vont se braquer, la tension va monter de part et d’autre et il va se faire montrer la porte aux prochaines élections .

Louis-René Bélanger, M.D.


Je suis médecin de famille au GMF Medi Centre à St-Jean-sur-Richelieu.

Ce projet de loi est une vraie farce de mauvais goût dont les conséquences seront désastreuses pour la population du Québec. Les médecins québécois ne peuvent pas travailler plus. Mais pourraient travailler mieux.

La première ligne a grandement besoin de support. Plus de professionnels à qui déléguer des tâches, plus d'accès aux spécialistes, moins de délais pour les examens, plus de soins en santé mentale (les besoins sont É-N-O-R-M-E-S et ne cessent d'augmenter), moins de paperasse inutile, plus d'outils technologiques fonctionnels (CoeurWay intégré à Myles, par exemple, et non pas SAAQclic). On ne demande que ça, travailler mieux et plus efficacement. On ne demande que ça, augmenter l'accès à la population.

Il est inacceptable que certains Québécois aient accès à un médecin de famille et d'autres non. Pourquoi deux classes de citoyens, alors que tous paient leurs impôts? Malheureusement, c'est la conséquence du manque de planification des effectifs, des coupes dans les soins préventifs de première ligne et de la dévalorisation de notre profession orchestrée par notre gouvernement. On est tous d'accord que chaque Québécois devrait avoir accès à un médecin de famille. Mais cela est impossible avec une pénurie grandissante de plus de 2 000 médecins de famille. Grandissante car >20% de nos effectifs ont >60 ans et ne pense plus qu'à une chose actuellement: la retraite. Grandissante car de nombreux médecins de famille désabusés et épuisés regardent vers les herbes plus vertes de nos provinces voisines. Grandissante car les besoins de la population augmentent exponentiellement dû au vieillissement de la population et à la mauvaise santé métabolique de nos concitoyens, faute de prévention.

Il est déplorable que le gouvernement n'écoute pas ses propres experts et simplifie un problème complexe: c'est la faute des méchants médecins. Les médecins sont paresseux et ne travaillent pas suffisamment. Et surtout, les médecins sont responsables des échecs lamentables du système. Sortons le bâton, brassons la cage! Tout le monde sait, si vous me permettez l'ironie, que ce sont les méchants médecins qui ferment les salles d'opération faute de personnel, qui n'investissent pas dans la vétusté de nos hôpitaux, qui bâtissent des Maisons des Ainés à 1,8 M$ la chambre, qui n'arrivent pas à jouer convenablement leur rôle de médecin-psychologue-physiothérapeute-optométriste-dentiste-ergothérapeute-travailleur social pour pallier au manque d'effectifs des autres professionnels. Et eux qui osent prendre des congés parentaux, des congés de maladie, des départs progressifs à la retraite. Car oui, surprise, les médecins sont eux aussi des êtres humains qui doivent dormir, manger, avoir une vie familiale.

Cela prendra des décennies à se rétablir du mal fait par le dépôt du projet de loi 106. Combien de centaines de médecins sont déjà en train de se réorienter, fuir le Québec ou tout simplement prendre leur retraite? Les dégâts sont d'une tristesse infinie. La population du Québec mérite tellement mieux qu'une médecine fast-food aux 10 minutes, par des médecins blasés et désabusés... Je n'ose même pas imaginer l'augmentation des erreurs médicales, des mauvais diagnostics et de la morbidité-mortalité qui en découlera.

Je vous en prie... Aidez-nous à sauver la médecine familiale, pour le salut de la population québécoise. La médecine de famille est à l'agonie...

Julie Robitaille, M.D.


Comme d’innombrables collègues, je suis choquée par les orientations de notre gouvernement et de ses dangereuses dérives incluses dans le PL106.

Je suis médecin de famille, j’ai 18 ans de pratique. J’ai bientôt 44 ans.

J’ai travaillé 10 ans en urgence et hospitalisation, puis 7 ans en CHSLD (incluant chef-CHSLD durant toute la COVID), dans la région de Victoriaville. Tout ceci combiné avec du bureau depuis le début de ma carrière. J’ai près de 1 300 patients inscrits, dont 47% sont vulnérables, en plus de participer à l’offre GAP (1 100 pour mon groupe de 4 médecins) et à l’enseignement auprès d’externes et de résidents. Je suis la chef-GMF (GMF de Kingsey-Falls, qui regroupe deux sites) et la co-gestionnaire de la clinique médicale de Kingsey Falls, où 6 médecins y pratique.

La clinique a été entièrement rebâtie en 2023, à grands coûts et aux prix de nombreux efforts.

Nous avons une technologie de pointe, des locaux ergonomiques mais surtout, de précieuses employées que nous payons de notre poche (dont 4 infirmières privées pour 6 médecins), ce qui nous permet d’être de réelles magiciennes de l’efficience et de la qualité des soins dans ce réseau où tout est brisé, tout est un obstacle, où les professionnels GMF prévues au programme ne sont jamais fournies, etc. Vous comprendrez cependant que cette clinique nécessite d’énormes coûts de roulement - mais nous étions prêtes à amputer notre revenu pour augmenter la qualité des soins, l’accessibilité pour nos patients et par la bande, l’expérience client et notre propre bonheur au travail.

Je suis extrêmement fière du travail accompli et de mon équipe - 6 médecins merveilleuses, qui avons à cœur la qualité des soins, mais aussi l’accessibilité des soins, autant pour nos patients inscrits que les orphelins. Cette clinique au goût du jour et la précieuse collaboration avec nos infirmières privées nous permet d’ailleurs encore d’inscrire activement des patients, et d'augmenter notre groupe d'orphelins inscrits, bien que quatre d’entre nous exercent aussi en 2e ligne (CHSLD, UCDG et hospitalisation).

Mais...

L’accumulation successive de diverses lois pour nous « contrôler » et nuire à notre autonomie professionnelle ne cesse d’augmenter.

La lourdeur du réseau est le principal obstacle à l’efficience : les bourdes du CRDS, les erreurs multiples du nouveau laboratoire SIL-P qui nous met à risque d’erreurs médico-légales graves, tous les professionnels - physio, ergo, nutrition, psycho, TS, alouette! - qui désertent le réseau public, et j’en passe.

Mais ce projet de loi 106 dépasse l’entendement!

D’abord, il s’agit d’une baisse drastique de revenu, peu importe notre « efficience » […]

Ensuite, et surtout, relier une partie de notre rémunération à des cibles de performances, qui sont de facto impossibles à atteindre sans le support d’un réseau fonctionnel, de professionnels en appuis, etc.? Des cibles qui ne sont pas atteintes de par la mauvaise gestion des ressources humaines et financières de notre gouvernement, mais dont il refuse toute imputabilité? des cibles comportant des variables sur lesquelles les médecins n’ont aucun contrôle?

Des cibles de performance qui déshumaniseront complètement la médecine? […] (et de fait, quel problème de santé nécessitant une évaluation médicale se règle en 8 minutes? même les cas simples/"mono-problèmes" prennent plus que ceci pour faire des soins humains, centrés sur le patient et diligents - si c’est moins de 8 minutes, ça ne nécessitait simplement pas un rv médical!).

Des critères de durée pour les hospitalisation - vraiment? comme si on gardait les patients par pur plaisir à l’hôpital? […]

et la prévention là dedans, on n’en parle plus? on s’enfonce encore plus dans ce système où on attend que les gens soient brisés pour les réparer, au lieu de miser massivement sur la prévention et l’éducation?

et la relation patient-médecin, essentielle au suivi longitudinal? les liens que nous créons avec nos patients au fil des années sont précieux, autant pour les patients que pour nous, et est la base d’une médecine intégrative et humaine. Maintenant, des codes de couleur, une intelligence artificielle qui dirigera les gens vers « un » professionnel? Ne vous méprenez pas, je suis la première à vanter le travail interdisciplinaire et valoriser les compétences de tous les professionnels, mais n’est-ce pas un peu réducteur pour notre expertise de prétendre que tous et chacun peut nous remplacer après une formation tout à fait non-similaire? après tout, je ne me prétends pas infirmière, TS, physio, pharmacienne - ils ont leur propres expertises et compétences que je n’ai pas.

Si le projet de loi 106 passe, c’est la fermeture de la clinique médicale de Kingsey Falls. Oui parce que l'équilibre financier sera rompu. Mais avant tout, parce qu'aucune d’entre nous ne voudra travailler dans un climat qui n’est pas en accord avec nos valeurs humaines et nos obligations professionnelles et déontologiques. Oui, la retraite de la médecine, malgré notre moyenne d’âge de 39 ans - nous sommes assez jeunes pour nous orienter dans un tout autre domaine.

Puis, 25% des médecins de famille ont plus de 60 ans, n’êtes-vous pas inquiets de départs massifs à la retraite?

Et qu’en est-il aussi de nos collègues spécialistes? plusieurs envisageront la retraite aussi.

Des discussions avec des collègues d’autres cliniques et observer ce qui se passe sur les réseaux sociaux de groupes de médecins font aussi voir un autre phénomène: un départ significatif vers d’autres provinces ou d’autres pays, autant chez les médecins de famille que les spécialistes. Non, pas pour leurs propres poches - sauf exception, nous ne sommes pas ces médecins égocentriques et avides d’argent que le gouvernement aime bien dépeindre dans les médias. C’est le climat politique, le mépris, la désinformation dans les médias, les conditions de travail, la vétusté du réseau, l’absence de supports professionnels, l'absence d’outils de travail efficaces, puis l’accumulation successives d’obligations et de contraintes légales qui font fuir les médecins vers la retraite ou en dehors du Québec.

Et la relève? il ne faut plus la compter, la médecine familiale étant boudée au Québec depuis plusieurs années déjà. A-t-on vraiment besoin d'expliquer pourquoi?

Cet exode massif ne fera que fragiliser un réseau déjà sur le point de la rupture, pour les 15-20 prochaines années (car ceux qui quitteront, ne comptez pas sur le fait qu’ils reviendront une fois certains correctifs apportés.) […]

Bref, ce n’est pas parce qu'on impose aux équipes épuisées en place une cible de 100% de prise en charge, de X rv en moins de 72 heures et autres statistiques farfelues qui plaisent aux gestionnaires complètement déconnectés du réseau, que tout à coup on abolit l’attente et qu'on règle les inefficiences du réseau! Mais c’est exactement comme ça qu’on fait fuir les soignants, qu’on diminue la qualité des soins, qu'on abolit les soins humains, et qu’on fragilise encore plus l’accessibilité des soins - les soins ne peuvent PAS être accessibles s’il n’y a plus personne pour les donner!

On ne soigne pas mieux en pressant les médecins et tous les autres professionnels. On soigne mieux quand on les soutient. Le travail du Collège des médecins du Québec est de protéger le public, je crois qu’il est grand temps que le CMQ fasse une levée de bouclier ferme et claire, et protège le réseau, les professionnels qui y travaillent et surtout tous ses usagers, contre ce gouvernement qui politise à outrance la santé à des fins électorales, qui méprise ses soignants en colportant des faussetés dans les médias et qui n’écoute même pas les experts mandatés (par eux-mêmes!) pour corriger, oui, les problèmes d’accès et de fluidité dans le réseau.

Isabelle Lemieux, M.D.


Le dénigrement omniprésent de la profession médicale, surtout des spécialistes en médecine de famille, n'aidera aucunement la situation actuelle. On ne peut pas être tenus responsables de ce que nous ne contrôlons pas, notamment:

- Les 400 000 rendez-vous médicaux annuellement non honorés par la patientèle;
- L'absence du respect des engagements de personnel de la part des CIUSSS sans possibilité de recours de la part de nos GMF;
- L'absence de soutien des autres professions de la santé. Nous voyons trop souvent de cas qui auraient dû être vus en optométrie, en médecine dentaire ou en physiothérapie.
- Nos enjeux personnels et organisationnels.
- Les conditions des patients.
- Notre absence de filet de sécurité.
- Mes collègues chirurgiens contrôlent-ils davantage leur accès aux plateaux techniques?

Dans le contexte actuel, m'imposer jusqu'à 25% de pénalités salariales, tout en modifiant unilatéralement ma rémunération, avec un modèle incompatible avec une patientèle moins nombreuse et nécessitant des soins médicaux réguliers? Personne n’accepterait cela. Alors pourquoi nous? […]

Ultimement, ma responsabilité principale concerne ma qualité de pratique. Ça ne se mesure pas en volume, ça ne se mesure pas en satisfaction du patient. Des pénalités si les patients n'ont pas leurs prescriptions inappropriées voulues sont un non-sens et vont nuire à notre démarche. Je suis désolé, mais en tant que travailleur autonome sans filet de sécurité, si le Québec ne me permet pas de pratiquer ma spécialité dans des conditions sécuritaires pour mes patients et acceptables pour mon fonctionnement, j'irai ailleurs.

Je ne crois pas qu'on doive être nécessairement amis avec notre ordre. Cependant, ce dernier se doit d'assurer la protection du public et de l'exercice d'une médecine de qualité. Nos doléances ne viennent pas d'un ventre plein, mais d'un cœur brisé par la détresse personnelle et quotidienne que nous vivons. Et pourtant, on répond présent pour nos patients. Je vous remercie de partager notre inquiétude par rapport à la qualité des soins.

Dr Laurent Lévesque, M.D.


Je suis MDF au Lac St-Jean depuis 15 ans. Je pratique en cabinet ainsi qu’à l’hospitalisation.

Le PL 106 déposé cette semaine par M. Dubé est à mon avis la goutte de trop. La goutte de trop dans un système malmené et sous financé. Il devient de plus en plus difficile d’offrir des soins de qualité à la population dans ce contexte toxique entretenu par la classe politique. La première ligne médicale représente 3 % du budget de la santé. Comment peuvent-ils entretenir ces mensonges que Legault et Dubé profèrent devant les médias pour des votes ? Je regarde pour aller travailler ailleurs. Jamais je n’aurais cru penser ça (sauf quelques jours du temps de Barrette). Cette fois-ci par contre c’est trop. Je suis également président de mon association régionale d’omni… J’ai déjà quelques lettres reçus d’excellent médecins que j’estime grandement qui me mentionnent être prêts à partir à la retraite si ce torchon passe. Quelle gaspille de talents et de soins. Ce projet de loi, et l’attitude toxique de mari violent de la part de Legault et Dubé vont causer un tort irréparable à la profession de médecin de famille, déjà vampirisée par d’autres depuis 10 ans. Le ministre et son boss doivent cesser de mentir et doivent nous donner les données appuyant leur discours du tiers des médecins qui ne travaillent pas assez.

J’ose espérer que mon collège, qui me semble être le dernier rempart de la lucidité devant le gouvernement, va prendre acte de cette situation et mettre son pied à terre, au nom de la qualité des soins, au nom des patients du Québec qui méritent tellement mieux que ça. Le comité d’experts retenu par le ministre lui-même décrit les conditions gagnantes pour l’amélioration du système de la santé. Cela doit immanquablement passer par de l’écoute et de la collaboration. En continuant dans cette voie coercitive et dégradante, le réseau québécois court à sa perte et laisse la porte grande ouverte à au privé, ce que la CAQ semble vouloir depuis le début, sous des apparences de bon père de famille, le loup est déjà entré dans la bergerie.

Kevin Girard, M.D.


Je me permets un court message pour m’exprimer. En toute franchise, je suis d’avis que le CMQ emboîtera le pas au gouvernement en critiquant la performance de la profession médicale et en avalisant une nouvelle salve de « doctor bashing ».

Dans tous les cas, cette attaque est pour moi la goutte qui fait déborder le vase. Depuis 7 ans, je me donne à 100 pourcents. Je ne compte pas les heures. Je supporte plusieurs semaines par année mes collègues en région. Malgré cela, et les efforts que je perçois de mes collègues, nous sommes continuellement la cible des critiques.

La performance, ça se discute. Le gouvernement veut en fait masquer une réduction substantielle de nos revenus avec cette performance. Il nous fragilise mentalement et financièrement. Nous n’avons aucun avantage social. Je suis désolé mais je ne vois pas comment nous pourrons prodiguer des soins de santé de qualité alors que nos pensées sont envahies par le traitement qui nous est réservé.

Je pense personnellement quitter la profession où la province à la recherche d’un milieu qui me respecte.

Sebastien Lachance, M.D.


Il n'est pas réaliste de pratiquer une médecine de qualité en augmentant le débit au nom de la performance. Il n'est pas réaliste d'augmenter la performance actuelle des médecins de famille avec la pénurie de ressources et le dysfonctionnement du système de santé.

Dans le contexte actuel, demander aux médecins de famille d'être responsable de toute la population mènera directement à une diminution de l'accessibilité et une réduction de la qualité des soins.

En ce sens, le projet de loi 106 ne protègera pas le public.

L'objectif réel de la loi 106 est donc questionnable.

Marie-Odile Gilbert, M.D.


Je trouve cela très inquiétant ce qui se passe avec le PL106. Cela semble une autre façon, comme ce qui a été fait avec santé Québec, de déresponsabiliser le gouvernement pour toute sa mauvaise gestion et ses erreurs du passé. Par exemple les AMP qui ont obligé pendant des années les médecins à exercer en établissement ce qui a fait souffrir pendant longtemps la première ligne.

Plutôt que d'ajouter d'autres règlements et contraintes à ceux déjà en place, il serait beaucoup plus efficace de trouver des solutions concertées. Ce qui m'inquiète c'est que cela poussera encore davantage de médecins vers la retraite, vers d'autres provinces / pays (comme ce qu'on lit beaucoup sur les réseaux sociaux) ou une réorientation de pratique en quittant le bureau (ce que je songe actuellement). Tout cela juste après avoir déposé une loi pour interdire de façon discriminatoire le passage au privé...

Le Collège des médecins devrait agir car son mandat n'est-il pas de protéger les patients ? Bientôt il ne restera plus grand médecin au Québec pour soigner les patients...

Aussi je trouve cela très préoccupant d'entendre qu'aux dires du ministre de la Santé dans les médias le projet de loi a été recommandé par le Collège des médecins pour élargir l'accès universel. Quand je pense qu'il va à l'encontre à plusieurs articles du code de déontologie du Collège des médecins du Québec :
article 7: Le médecin doit ignorer toute intervention qui ne respecte pas sa liberté professionnelle.

article 43: Le médecin doit s'abstenir d'exercer sa profession dans les circonstances ou états susceptibles de compromettre la qualité de son exercice ou de ses actes ou la dignité de la profession

Article 63,1: le médecin ne doit adhérer à aucune entente ni accepter aucun bénéfice susceptible d'influencer son exercice professionnel tant au regard de la qualité des soins que leur disponibilité et de la liberté de choix.

Je vois mal comment nous pourrons respecter notre code de déontologie avec le PL106 et le collège des médecins devrait il me semble se prononcer haut et fort contre ce projet.

Renaud Lambert-Julien, M.D.


L’heure est grave. Le CMQ doit prendre ses responsabilités et avouer qu’il s’est trompé.

Vous avez cru protéger la population en suggérant d’interdire aux médecins de quitter le système public. Maintenant avec le PL 106 ce sera bien pire…Les objectifs de performance à atteindre pour éviter les coupures de 25% sont non seulement impossibles à atteindre mais elles sont pour plusieurs hors de notre contrôle. Aussi le PL 106 va aussi à l’encontre de notre code de déontologie ( # 63-64-71-72-88-107). Sans parler des 25% ou plus des médecins de famille qui partiront à la retraite. Plus il y aura de départs, plus il y aura de pression sur les plus jeunes, moins il y aura de nouveaux résidents en médecine familiale et la population n’aura même plus accès au privé pour répondre à ces besoins… La nature ayant horreur du vide, ce sont les ipspl, qui elles peuvent faire ce qu’elles veulent, comme c’est beaucoup le cas présentement, qui travailleront au privé avec d’excellentes conditions de travail et une rémunération plus que généreuse.

Aussi on ne peut passer sous silence que les autres professionnels ( IPS, sages femmes et autres) gagnent déjà plus que les omnipraticiens à tâche égale… […] Tout cela ne va pas motiver beaucoup les médecins à donner le meilleur d’eux même, et ce à rabais, dans des conditions épouvantables qui nous exposent de plus en plus au niveau médico-légal […] en plus qu’on nous fait porter le poids de la destruction politique de notre système de santé habillement débutée depuis des décennies. Il y a des limites à toute chose et ici on se retrouve dangereusement proche d’un point de rupture, c’est tellement triste.

Le CMQ doit prendre ses responsabilités, ce que le ministère de la Santé a abandonné sur le dos de Santé Québec et des médecins. S’il ne le fait pas, il devra répondre de sa non-action devant les médecins et surtout la population. Il y a urgence d’agir, j’espère que le collège ne se laissera pas avoir par le gouvernement et ne me décevra pas une fois de plus. Je suis un médecin dévouée qui aime son travail plus que tout, mais je suis aussi épuisée, mentalement et physiquement et je ne pourrai malheureusement pas poursuivre dans ces conditions si rien ne change. Cela n’en vaudra plus la peine. Je suis déjà performante, et je pourrai l’être ailleurs ou dans un autre domaine. Assez c’est assez.

Annie Gagnon, M.D.


Nous avons à cœur comme médecin, d’offrir une médecine de qualité, accessible pour tous. Nous sommes très conscients que 85% des québécois ont accès à un médecin de famille et qu’il reste 15% de patients orphelins qui nécessitent eux aussi des soins. Nous devons trouver une solution pour offrir des soins de qualités à TOUS. Je comprends que ce projet vise à favoriser une prise en charge collective de TOUS les patients du Québec avec une rémunération par capitation en groupe pour les patients.

Toutefois, je souhaite exprimer mon avis selon lequel cette approche peut présenter des risques significatifs en matière de qualité des soins.

L’inscription en groupe, bien que pouvant sembler attrayante sur le plan organisationnel, va diluer la responsabilité individuelle. Lorsque la responsabilité est partagée entre plusieurs professionnels sans une attribution claire, il peut en résulter une prise en charge superficielle des patients. Cette situation pourrait compromettre le suivi rigoureux des examens et des traitements, comme le confirment diverses études et le groupe d’expert engagé par le gouvernement récemment. On l’a vu avec le GAP que l’inscription en groupe, peut compromettre gravement la qualité et le suivi des soins. Lorsque tout le monde est responsable, personne n’est réellement responsable.

Je comprends que de façon transitoire l’inscription de groupe pour une minorité de la population comme le GAP actuellement, permet d’offrir des soins à plus de personnes, mais cela ne devrait pas être le modèle à retenir pour le futur. Cela peut être acceptable le temps d’avoir assez de médecins pour offrir un médecin de famille à chaque patient.

Ainsi pour éviter de jeter le bébé avec l’eau du bain, pourquoi ne pas conserver l’inscription individuelle pour ceux déjà inscrit, offrir une inscription de groupe pour TOUS les autres québécois à un milieu de soin de leur secteur qui pourront, par la suite, être inscrit individuellement à un médecin de famille au fur et à mesure que de nouveaux médecins viennent grossir les rangs de la profession.

Un autre point important, la rémunération par capitation en groupe risque d’alourdir le processus de gestion et de diminuer le temps que les médecins peuvent consacrer aux soins directs des patients. Cette surcharge administrative pourrait nuire à l’efficacité et à la qualité des soins offerts.

Enfin, la mise en place d’une capitation en groupe va également entraîner des conflits entre médecins quant au partage des forfaits, ce qui serait contre-productif et nuirait à la collaboration nécessaire pour une prise en charge optimale des patients.

Je crois fermement que pour assurer une médecine de qualité, chaque patient devrait être suivi par un médecin de famille attitré, garantissant ainsi une continuité et une personnalisation des soins. Le modèle de capitation en groupe pour l’ensemble des québécois, tel qu’il est envisagé dans le projet de loi 106, est inadapté pour répondre à ces exigences de qualité.

Je vous encourage à refuser cette approche et à privilégier des solutions qui favorisent une prise en charge individualisée avec support en groupe et une collaboration interprofessionnelle, conformément aux principes éthiques et déontologiques de notre profession.

Sébastien Lavoie, M.D.


Je vous partage le message que j'ai partagé à M. Legault, M. Dubé, la FMOQ, l'AMOM et mes députés locaux.

Je vous écris pour vous faire part de mes inquiétudes par rapport au projet de loi 106.

Je suis résidente de la circonscription Saint-Henri-Sainte-Anne et je travaille comme omnipraticienne dans la circonscription de Sainte-Marie-Saint-Jacques, à Montréal.

Je travaille plus précisément à la Clinique médicale Fémina, dont je suis également copropriétaire, où nous pratiquons des interruptions de grossesse du premier trimestre et où nous offrons des services de contraception (counselling, prescription, insertion-retrait de stérilet, insertion-retrait d’implant et vasectomie).

Nous pratiquons environ 20% des avortements à Montréal, pour lesquels nous avons une entente avec le CIUSSS Centre-Sud, et 10% de ceux réalisés à travers tout le Québec.

Nous offrons environ 100 rendez-vous de contraception par semaine.

Pour ces deux secteurs de service, nous voyons bien sûr des gens de Montréal, mais également de bien plus loin, car ils ne trouvent pas toujours de services comme les nôtres (rapides, efficaces et empathiques) dans leur région.

Les médecins qui travaillent à la clinique sont exclusivement des omnipraticiens et notre rémunération se fait actuellement à l’acte. Certains font de la prise en charge dans d’autres milieux et certains ont des AMP (activités médicales particulières) différentes (IVG, hospitalisation, réadaptation, obstétrique, enseignement, etc).

De mon côté, j’ai déjà accepté une coupure de 30% de mon salaire pour me concentrer exclusivement à cette pratique que je juge essentielle, mais qui n’est plus reconnue comme AMP.

Nous ne sommes pas GMF et notre milieu ne fait donc pas d’inscription, car nous avons une pratique de 2e ligne de médecine familiale, pour laquelle nous recevons de multiples références de la part de médecins de famille, de gynécologues, de pharmacien(ne)s, d’IPS, d’infirmière clinicienne.

Le projet de loi 106 n’est cependant pas très clair par rapport à ces pratiques particulières, sans prise en charge ; qu’arrivera-t-il de la rémunération de ces médecins?

La valeur de nos actes n’a déjà pas augmenté depuis 2019, où nous avions alors eu une augmentation d’environ 1%. Ce pourrait-il que ce soit encore plus bas?

Comme médecin, je pense que le manque de valorisation de cette pratique est très triste et est un affront aux femmes, qui reçoivent ces services, mais également aux médecins, majoritairement féminins, qui œuvrent dans ce domaine.

Si nous voulons offrir de la contraception gratuite, encore faut-il que les femmes puissent y avoir accès! Et si l’accès à l’avortement est important, il faut pouvoir offrir les deux options (par instruments et par médicaments), à toutes les femmes, partout au Québec.

Comme copropriétaire de clinique, je m’inquiète également des impacts de ce projet de loi, car si les revenus des médecins diminuent drastiquement à la clinique, la marge de manœuvre de la clinique également.

Nous sommes un employeur qui se doit d’offrir de bonnes conditions à nos employées, nos coûts fixes (loyer, assurances, etc..) augmentent comme pour toute la population, le prix des fournitures explose, les exigences de laboratoires, de stérilisation prennent une ampleur démesurée, mais auxquelles nous devons nous conformer pour poursuivre nos activités.

Le contrat que nous avons avec le CIUSSS était indexé à moindre coût que l’inflation.

C’est l'implication des médecins dans ces pratiques et possiblement la survie de ces cliniques qui donc aussi en jeu.

Nous voyons bien sûr des personnes sans médecin de famille pour qui nous sommes une bouffée d’air frais dans leurs recherches de services.

Mais nous voyons également beaucoup de personnes qui ont déjà des médecins de famille, mais qui sont parfois trop loin, qui ne sont pas à l’aise avec la contraception ou avec ces gestes techniques ou encore pour qui une situation particulière se révèle au-dessus de leurs capacités.

Nous voyons également beaucoup de gens hors-RAMQ, de l’immigration temporaire ou permanente, en attente d’un statut, pour qui l’accès à un médecin de famille ou au réseau « classique » est très ardu.

C’est à tous ces gens qu’on dira que notre pratique n’est pas reconnue ?

Ces cliniques, les médecins qui y travaillent ainsi que la population que nous desservons doivent être considérés dans votre réflexion.

Maude Côté-Leduc, M.D.


Bonjour, je suis une nouvelle médecin de famille depuis moins d’un an et je travaille dans la région de Québec. Voici mon avis sur le projet de loi 106: Je suis un médecin qui ne « travaille pas assez » selon M. Dubé, car j’ai « seulement » 300 patients (bien que je travaille 5 jours par semaine). Le projet de loi ne prend pas en compte le fait que tous les médecins de moins de 15 ans de pratique sont soumis aux AMP et dans la plupart des cas, un AMP mixte est exigé pour répondre aux différents besoins du territoire.

Pour ma part, en plus de la prise en charge en GMF, mon autre AMP est les soins palliatifs à domicile. Comme vous vous en doutez, ce sont des patients extrêmement complexes et qui nécessitent parfois plusieurs visites par semaine afin de leur permettre d’être bien soulagés et de rester chez eux le plus longtemps possible et, parfois même, y décéder. Même lorsque je suis au GMF, je dois souvent répondre de manière urgente pour ces patients qui sont très vulnérables. Je ne peux donc pas augmenter mon nombre de rendez-vous par jour au GMF. En plus de cette quinzaine de patients de soins palliatifs, j’ai aussi une dizaine de patients gériatrique en perte sévère d’autonomie que je vois à domicile. J’ai accepté de les prendre en charge lors d’un transfert en bloc d’un médecin qui part à la retraite afin d’éviter qu’ils se retrouvent sur le guichet. De plus, sur mes 300 patients au GMF, environ la moitié ont plus de 65 ans et/ou sont vulnérables et ceci par choix. J’ai demandé moi-même au GAMF des patients âgés et vulnérables, car je suis persuadée que ce sont ces patients qui ont le plus besoin d’un suivi même si pour moi c’est beaucoup plus de travail. La plupart des patients que je prends en charge dernièrement n’ont pas vu de médecin depuis 6-10 ans. La prise en charge est alors très complexe et plusieurs patients « en santé » avaient en fait un diabète non diagnostiqué, de l’hypertension non traitée, une polypharmacie inappropriée, etc. Ça ne se règle pas en 10 minutes comme vous vous en doutez.

M. Dubé semble penser que lorsque l’on n’est pas en train de facturer un acte ou de voir un patient on n’est pas en train de travailler. Pourtant je travaille plusieurs heures (non rémunérées) par semaine à gérer les laboratoires, les fax de pharmacie, les rapports de spécialistes, etc. Je suis débordée et je ne peux pas en faire plus. Nous avons besoin en tant que société d’investir dans des solutions à long terme comme la prévention, les soins à domicile et le travail interdisciplinaire. En tant que jeune médecin je ne me vois pas travailler 30-40 ans avec la pression de performance que veut imposer M. Dubé. En cette première année de pratique, il y a eu des hauts, mais aussi beaucoup de bas. La seule chose qui me raccroche c’est la reconnaissance des patients. Je suis dévouée à mes patients, mais pas au prix de ma propre santé. Ce projet de loi n’améliorera pas la prise en charge, il fera simplement fuir les médecins qui s’occupent des plus vulnérables et qui offrent des soins de qualité aux patients.

Marie-Eve Buteau, M.D.


Ouvrir la porte à des indicateurs de performance sans les baliser et sans système de rétrocontrôle c'est mettre le doigt dans un engrenage où l'intérêt politico-économique va primer sur la qualité du soin, et où le patient et son médecin seront des variables d'ajustement entre les mains d'acteurs politiques.

Le climat actuel est extrêmement toxique et démoralisant. Les médecins sont traînés dans la boue par le ministère et les médias et présentés comme des parasites dépensiers et paresseux. Il n'y a clairement pas de négociation, mais un rapport de force malsain qui au final va pénaliser le patient.

La grosse part de 50% de capitation encourage les médecins à inscrire un volume excessif de patients mais la valeur des actes (18$ la visite d'après la proposition de mars 2025) et le tarif horaire (27$/h) sont clairement en décalage avec la réalité et ne motiveront jamais un médecin à majorer son volume d'heure. Surtout s’il n'a aucune emprise sur des indicateurs qui ne dépendent pas directement de lui.

On va se retrouver dans la situation suivante : des cliniques avec un volume de patients inscrits énorme pour faire du chiffre via la capitation, et une absence de rendez-vous et de disponibilité de la part des médecins, qui ne seront clairement pas motivés par les tarifs dérisoires avancés par le gouvernement.

Je ne parle même pas des autres professionnels de première ligne, qui ne sont clairement pas à la hauteur des besoins, des sommes monstrueuses englouties par le mammouth administratif, et de l'embouteillage de la 2e ligne qui se reporte de facto sur la 1ere ligne : au moins 30 à 50% de mes consultations sont du damage control en attendant que le patient ait son examen complémentaire ou bien soit pris en charge par son chirurgien ou son spécialiste, ou bien puisse avoir accès à un psychologue, un physio ou une T.S... Ni des formulaires à rallonge et du temps administratif qui gaspille au moins 30% de mon temps de travail.

Le CMQ ferait mieux de soutenir les médecins plutôt que de les bâillonner en les intimidant et en leur interdisant la plupart des moyens de protestation efficaces, y compris le départ au privé. Le code de déontologie est clairement en contradiction avec des indicateurs de performance qui détruisent l'indépendance et l'autonomie des médecins, et les empêchent de prodiguer des soins de qualité car on les force à inscrire en masse et à porter une responsabilité qui les dépasse.


Votre complicité dans l'interdiction du privé quelques semaines avant le dépôt de la loi 106 passe très mal à mes yeux.

Pour mon cas personnel, j'en ai assez. Je cesse le bureau d'ici 2 ans maximum. C'est regrettable car j'aime mon travail et mes plus de 1000 patients, mais ma santé mentale passe avant, et est indispensable pour faire un travail de qualité. Si ce n'était pas des raisons familiales, je partirais demain. Fermer la porte du privé ne m'empêchera pas de fuir le climat infect de la première ligne au Québec : j'ai un diplôme reconnu dans une trentaine de pays et un passeport. […]

Lionel Linck, M.D.


Avec ce nouveau projet de loi, le gouvernement veut pousser les médecins à faire de la médecine aussi rapide que la restauration…

Je ne vois pas en quoi il est dans l’intérêt du patient.

Je suis entièrement d’accord qu’il y a un problème d’accessibilité, qui s’est amoindri avec l’arrivée du GAP. Il reste du chemin à faire, mais le projet de loi 106 n’est pas la solution, tant pour la population que pour le corps médical.

Julie Cormier, M.D.


Je trouve qu’aucun aspect de cette loi ne fait du sens, pas comme elle est présentée actuellement. C’est très réducteur comme loi et ça démontre bien que le gouvernement ne comprend pas comment le système fonctionne actuellement à mon avis. Si elle est appliquée, certains points pourraient même aller contre notre code de déontologie. Le CMQ devrait le dire haut et fort dans les médias. On ne peut pas performer a tout prix en médicine, on traite des humains et ceux sur le terrain savent bien que le manque de performance provient de multiples éléments: amp en autre chose que PEC, manque de personnel et déficience en gestion entre autres. Les GMF ne pourraient pas fonctionner du tout si l’offre sur la table est entérinée et devront fermer, car c’est nous qui le finançons en bonne partie avec notre salaire. Bien que la capitation Nest pas une mauvaise idée en soit, le salaire proposé aux omnis en première ligne est ridicule et insultante. Je suis aussi très déçue de toute la désinformation qui se dit dans les médias. J’aimerais bien que le CMQ se prononce d’avantage en notre faveur et qu’il corrige une fois pour toutes les faussetés entendues dans les médias. Merci!

Marie-Pier V. Brizard, M.D.


À titre de présidente de mon asso régionale, j’ai rencontré plusieurs membres et résidents: tous sont dévastés par ce projet de loi qui dénigre la profession et les médecins. Visiblement, le gouvernement ne saisit pas ce qu’est l’essence de la médecine familiale, l’importance du suivi longitudinal, de créer des liens de confiance avec nos patients. La 2e ligne sera aussi impactée: être performant sans les outils, ne pas avoir de contrôle, met en échec la performance de tous les médecins. Pour les résidents, ne reste que la fuite vers d’autres provinces ou le joug. Pour les médecins établis, le joug, la retraite, le changement de carrière ou la fuite vers d’autres provinces. On voit nos voisins ontariens mettre 1 G$ en première ligne pour améliorer l’accès, l’Alberta qui recrute des médecins plus facilement depuis les derniers incitatifs financiers. Aucune autre province canadienne n’a de PREM ni AMP ni ne fonctionne avec autant de coercition que le Québec. Les autres provinces ont un mécanisme d’arbitrage, pas nous. Pourquoi ne pas nous inspirer de ce qui fonctionne ailleurs au Canada?

Les patients se font chanter la pomme par le gouvernement, mais ce projet de loi ne fait que les amener en bateau.

La détresse est grandissante chez les médecins et plusieurs risquent de quitter le bateau québécois, alourdissant encore la charge pour ceux qui restent.

Personnellement, j’ai toujours conservé mon permis de pratique de l’Ontario, depuis 1992, on ne sait jamais…plan B.

Dre Lyne Couture, présidente


Je suis en pratique depuis douze ans comme médecin de famille où j'ai travaillé en cabinet, en CLSC, à l'urgence et au soutien à domicile en milieu rural comme urbain. En plus, je suis médecin responsable de notre GMF depuis dix ans.

Ça fait douze ans que je tiens espoir qu'un jour le gouvernement va valoriser la médecine familiale et qu'on va comprendre, comme avec les infirmières, qu'on est la fondation sur laquelle un système de santé se repose. Je gardais espoir qu'avec une pénurie de 2 000 médecins de famille, qu'avec un autre 2 000 médecins de famille qui prendront leur retraite d’ici 5 ans et qu'avec les nouveaux médecins qui fuient la prise en charge en médecine familiale, sûrement il doit faire quelques choses pour aider.

Ce mercredi, avec le PL106 j'ai perdu toute confiance dans notre ministre de la maladie et je vois là qu'il n'a aucun avenir pour la médecine familiale au Québec. Avec ce geste, il a éteint ma passion pour la médecine et pour la première fois cette semaine, après 20 ans de faire la promotion de la médecine familiale aux étudiants en médecine, j'ai dit à mon étudiante, d'éviter de venir médecin de famille au Québec. Je ne vous cache pas que ça s'était un trauma profond pour ma psyché et mon identité comme médecin de famille.

Là, il faut à nouveau comme à chaque fois qu'il change les règles mi-parties, faire le constat des dommages. Si ça passe comme, et qu'il nous force à avaler ça avec les mains menottées, un tiers des médecins de GMF vont quitter la pratique, moi compris, et on va perdre notre statut GMF et il y aura un autre 4 000 patients sans médecins. J'appelle au secours pour la médecine familiale!

Anthony Rizzuto, M.D.


Je suis un médecin de famille depuis 2002. J'ai toujours rêvé de faire cette profession. J'ai fait des sacrifices pour y arriver. J'ai choisi la médecine familiale. Avec mon cœur. Je voulais soigner des familles, des gens de tout âge, voir toutes sortes de problèmes.

Et surtout, je voulais faire le suivi de ces gens au long cours. Après presque 23 ans, je peux vous affirmer que j'adore ce que je fais encore. A 51 ans, je me donne encore 10 ans pour travailler à temps plein et ensuite, à temps partiel si ma santé le permet.

J'aime mon travail. Mais je déplore les conditions dans lesquelles je travaille. Depuis mon entrée dans le système de santé québécois, les conditions ne cessent de se détériorer. J'ai de plus en plus d'obligations à remplir à cause du gouvernement et je n'ai pas d'aide supplémentaire.

Si le projet de loi 106 passe, je songe très sérieusement à changer de carrière. Voici pourquoi:

1. Je suis déjà à la limite de ce que je suis capable de faire en termes de temps de travail. Je travaille déjà trop. Je dois travailler les soirs et les fins de semaine pour faire de la paperasse et je n'ai déja pas assez de temps de repos. […]

2. Je ne baisserai pas mes standards de pratique pour évaluer des patients en 8 minutes. Les patients parlent et pleurent. […]

3. Je dois suivre mon code de déontologie où on peut lire:

Le médecin doit, dans l'exercice de sa profession, tenir compte de ses capacités, de ses limites ainsi que des moyens dont il dispose.

Le médecin doit s'abstenir d'exercer sa profession dans des circonstances ou états susceptibles de compromettre la qualité de son exercice ou de ses actes ou la dignité de la profession.

Le médecin doit exercer sa profession selon des principes scientifiques.

Le médecin doit ignorer toute intervention qui ne respecte pas sa liberté professionnelle.

Le médecin ne doit adhérer à aucune entente ni accepter aucun bénéfice susceptible d'influencer son exercice professionnel tant au regard de la qualité des soins que de leur disponibilité et de la liberté de choix du patient

Le médecin doit s'assurer que la priorité d'accès à des soins médicaux soit donnée à un patient strictement en fonction de critères de nécessité médicale.

Mon revenu total est un chiffre d'affaire. J'ai une entreprise à gérer (je fais la gestion d'une clinique médicale avec mes collègues). C'est moi qui paye tous les frais de la clinique avec mes collègues. Je dois me prendre des assurances médicaments, assurances responsabilité, assurances invalidité, assurance vie. […]

Bref, si le projet de loi passe, je n'aurai pas d'autres choix que de devancer ma retraite de la médecine et de faire carrière dans un autre domaine. Le métier que j'aime tant, le métier pour lequel j'ai fait des gros sacrifices, des grosses études, je vais l'abandonner. Car ce sera une question de survie pour moi. Et plusieurs feront comme moi. Et au final, ca sera une question de survie de notre système de santé public québécois.

Mylene Simard, M.D.


C’est totalement inacceptable. Comment le CMQ pourra-t-il protéger le public si la responsabilité est partagée?

Comment voulez-vous que nous inscrivions tous les patients alors que les goulots d’étranglement sont au-delà de nous?

Combien le gouvernement dépensera-t-il en fonctionnaires pour « surveiller « notre performance alors que nous n’obtenons pas les laboratoires, les imageries ni les consultations spécialisées suite à notre visite en 1re ligne?

Et avez-vous surveillé la volumétrie des sages-femmes, des IPSPL, des infirmières ou travailleuses sociales et autres professionnels en GMF?

Quand est-ce que le CMQ va nous démontrer qu’il souhaite vraiment que nous offrions des soins de qualité?

Marie-Pierre Chalifoux, M.D.


Ce projet de loi ignore tout bonnement l’aspect qualitatif des soins, de toute nature, et fait de la performance une donnée quantitative. La médecine ne peut être réduite à des chiffres et s'obstiner dans cette voie est une perte de temps.

Certaines des cibles proposées, même incomplètes, sont déjà inatteignables et déconnectées de la réalité. Je me questionne à savoir si des médecins ont participé à l'élaboration de ces cibles ou plus globalement au projet de loi.

Tout aussi important, ce projet occasionne énormément de stress chez les médecins. La possibilité d’une réduction salariale comme celle qu’engendrerait ce projet de loi est une source majeure de stress, peut-être particulièrement pour les nouveaux médecins qui ont encore plusieurs dettes à rembourser. Quand on choisit de pratiquer la médecine, on ne sait pas toujours dans quoi on s’embarque, mais la sécurité financière est une constante. Non, une garantie. Il est inacceptable de se faire retirer cette sécurité.

À cela, ajoutons que la déshumanisation des soins que requerraient ce projet de loi serait une atteinte directe aux médecins, déjà en crise actuellement. La santé mentale de nos soignants est en jeu avec ce projet et il est bien établi que l'offre de bons soins de santé passe par des soignants en santé.

Non au PL106.

Pascale Bouvet-Bouchard, M.D.


Voici mon histoire: J’ai quitté ma pratique au bureau parce que je savais que j’allais être un meilleur médecin à soigner des patients en soins palliatifs et à l’hôpital. […]

Je vois mal comment la loi 106 peut être appliquée pour mon domaine : performance c'est l'antagoniste de soins de fin de vie. C'est fondamental pour moi d'être investie afin d'alléger le processus de fin de vie à mes patients et leurs proches mais le gouvernement me demande d’être performante. Humanisme, dévouement, prendre le temps... c'est de cette façon qu'on offre des soins de fin de vie de qualité. Non seulement mon travail a un impact sur mes patients mais aussi sur leur famille et le deuil. Et m’investir comme je le fais à 27$/h c’est rire de moi. En plus, le fait de ne pas pouvoir être performante dans mon domaine, je risque non seulement de réduire mes revenus mais aussi impacter le salaire de mes pairs. Cela n'a absolument aucun sens. Avec la loi 106, il est évident pour moi que la solution serait de travailler en Ontario ou faire de la télémédecine au privé à temps plein qui me rapportera un salaire plus élevé que ce que je fais actuellement au système public qui est brisé. À quoi me sert-il de continuer à vouloir travailler dans un réseau qui ne veut pas de moi? Je ne ferais pas mon emploi actuel pour moins de rémunération surtout que je me bats à fond pour tenter de changer les choses sur le terrain. J’ai du potentiel, du talent, de la passion et de la détermination. Je saurais faire profiter un employeur qui va me respecter et qui me traitera à ma juste valeur.

Anita Trinh-Leang, M.D.


[…] La seule façon d’améliorer le fonctionnement du système de santé et diminuer les listes d’attente et les délais d’accès aux services, c’est de recruter des médecins, infirmières, infirmières auxiliaires, travailleuses sociales, psychologues, technologues et autres professionnels; et augmenter le nombre de lits aigus, lits de réadaptation et lits de soins prolongés et hébergement. Toutes les autres ressources : médecine de jour, chirurgie d’un jour, soins à domicile, suivi intensif dans la communauté, devront aussi être augmentées. Autrement, on ne videra jamais ces listes d’attente, et on peut commencer à se demander si l’espérance de vie pourrait en souffrir éventuellement.

J’ai beau chercher, je ne trouve que peu d’annonces concrètes du ministère de la santé qui pourrait laisser entrevoir qu’on veuille augmenter significativement le nombre de lits, d’infirmières et autres professionnels […]

À la défense du gouvernement, on parle d’un nouvel hôpital pour remplacer l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, avec une augmentation substantielle du nombre de lits (de 400 à 720), mais ce projet est dans les cartons depuis au moins 2021 et peine à se réaliser (La Presse+, 27 mars 2025). On semble cependant vouloir augmenter les services à domicile, le nombre de préposé(e)s aux bénéficiaires, le nombre d’auxiliaires et le nombre d’étudiants en médecine. Bravo, mais ça va prendre au moins 7 ans avant de voir des résultats concrets à cette dernière mesure; si les nouvelles cohortes commencent en septembre 2028, ça mène à 2035 pour un médecin de famille, et 2038 ou 2039 pour un spécialiste… et il faut trouver des professeurs, des superviseurs et des milieux de stage. À terme, cette mesure augmentera tout de même significativement le nombre de médecins au Québec et améliorera l’accès à la première ligne et aux services externes, mais pas aux services qui nécessitent une hospitalisation. En revanche pour mettre en œuvre la loi 15, il y eu des embauches de gestionnaires. Le ministère se concentre sur l’administration et l’encadrement du système, pas sur le nombre d’intervenants. En mettant toute l’emphase, et toute l’énergie sur son projet de loi, le ministre garde dans l’ombre toute la question du ratio lits et ressources humaines/population. Le ministre montre qu’il ne veut pas accroître ces ressources.

Les administrateurs et gestionnaires adorent se donner des objectifs à atteindre pendant leur mandat. Il serait temps de demander au ministre de la Santé de rendre publics les objectifs au Québec en termes de : nombre de lits d’hôpitaux/population, nombre de médecins, d’infirmières, de psychologues, de travailleuses sociales et autres professionnels de la santé/population.

Marc Lonergan, M.D.

Note : L’auteur de ce commentaire a soumis un article complet sur son analyse; nous avons choisi de publier un extrait dans l’espace Forum. 


Je suis retraité depuis 2 ans après une carrière de 50 ans. J’endosse bien des commentaires de mes confrères. Voici 3 de mes principales observations:

1* Je suis un cobaye de la réforme de 1968 de la formation médicale. Un nivellement par le bas qui a heureusement été récupéré par ma formation clinique de 4e et 5e année. J’ai acquis une plus grande sensibilité sociale et psychologique aux facteurs déterminants de la santé au détriment de connaissances et d’habilités spécifiquement médicales.

2* Dans mes 10 premières années de pratique j’ai cru à l’équipe multidisciplinaire. Résultat: 2 médecins plein temps avaient 85% de la prise en charge des patients contre 15% pour 6 temps plein des professionnels non médecins.

3* J’ai dirigé une maison privée de thérapie pour troubles concomitants (usage de substances et troubles psychologiques) pendant 23 ans accréditée par Agrément Canada. Résultats: 1 médecin pour 12 membres de personnel professionnel et de soutien, per diem 5 FOIS moindre qu’un traitement semblable en établissement public.

Plusieurs spécialistes constatent que le système de santé est un mammouth et c’est vrai. Il a besoin d’une chirurgie de son code génétique, une révision des prémisses de la réforme Castonguay, une bonne idéologie mais déconnectée de la réalité. Prioriser les services en fonction d’un code couleur et de l’importance de la pathologie, c’est revenir à une notion de maladie et non de santé. La dimension prévention devrait être la spécialité d’une autre discipline.

Benoit Girard, M.D.


Il est inconcevable de parler d'indicateurs de performance dans un contexte de soins de santé.

On ne peut pas suggérer aux médecins comment pratiquer la médecine, ou comment être plus performant. Les variables sont trop nombreuses.

Le médecin, le patient, la maladie et le contexte.

Pour moi la performance c'est de m'en tenir aux recommandations officielles et plus pour le mieux-être de mes patients peu importe le temps que cela demande; c'est-ce que l'on appelle être consciencieux.

Pour le reste cela est hors de mon contrôle comme "voir plus de malades à dans un temps donné". Tourner les coins rond " ou diminuer la qualité des soins pour la quantité. C'est contre notre code d’éthique...

Voilà cela nous concerne tous. Et ça me rassure de savoir que le collège sera toujours là pour veiller à la qualité des soins au Québec.

Jean Lamarche, M.D.


Le projet de loi 106 rejette la responsabilité d'un système défaillant sur les médecins de famille, comme si nous étions le problème au lieu d'être ceux qui le maintiennent en place. Il accumule les attentes irréalistes sans s'attaquer aux problèmes fondamentaux, tels que la pénurie de personnel, le manque de ressources et un gouvernement qui refuse d'écouter. Nous avons besoin de collaboration, et non de conflit, pour améliorer notre système de santé.

Alex Kooiman, M.D.

Note : Ce message a été traduit avec un outil d’intelligence artificielle.


Tout d’abord, je trouve déplorable l’attitude du gouvernement envers les médecins de la première ligne. Il est faux de dire que le tiers des médecins de famille ne travaille pas suffisamment. Il a été clairement démontré que les médecins font de nombreuses tâches non comptabilisées. Le gouvernement semble faire la sourde oreille et il n’est pas capable de justifier de tels propos. Il n’y a rien de constructif afin d’améliorer l’accès aux soins.

Ce projet de loi risque de démobiliser les médecins sur le terrain et encourager une portion des 22% des médecins qui ont plus de 60 ans à prendre une retraite anticipée. Le Ministère assume qu’il y a un manque d’au moins 1 500 à 2 000 médecins de famille au Québec et que la société doit en former davantage pour répondre aux besoins grandissant de la population. Il y a même un comité qui a été formé pour valoriser cette belle profession. Comment espérer des retombées positives alors que le ministre de la Santé, qui accuse à tort un nombre considérable de médecins de famille de ne pas contribuer suffisamment, est sur ce comité? La population a le droit d’avoir l’heure juste. Il est vrai que de grands changements doivent avoir lieu dans l’organisation de la première ligne. Par contre, ce n’est pas avec de tels projets de loi que l’accès sera facilité. Il faut qu’il y ait de vraies discussions entre les fédérations médicales et le Gouvernement.

Pour terminer, j’aimerais attirer votre attention sur cet extrait d’une entrevue du Ministre Dubé à LCN avec Mme Emmanuelle Latraverse le 10 mai dernier. Avec la Fédération des médecins, «c’est toujours la faute des autres», déplore Christian Dubé

Il justifie son PL 106 afin de « rendre imputable » les médecins afin qu’ils soient présents à leurs gardes. Il donne l’exemple d’un médecin qui ne serait pas présent pour un patient un vendredi 16h et qu’il serait de retour seulement le lundi suivant. Je trouve cette affirmation honteuse et dangereuse. C’est vraiment très mal comprendre les mécanismes d’autoréglementation de la profession via le Collège des médecins du Québec. Ces propos complètement faux portent atteinte à la confiance de la population envers les médecins. J’estime que le CMQ ne peut pas laisser le ministre de la Santé dire cela sans intervenir.

Gabriel Lauzière, M.D.


On nous demande encore une fois de faire plus! C’est comme si on demandait à une enseignante de 2e année de prendre non plus 40 élèves dans sa classe qui devrait en contenir 23, mais 60 élèves.

Ce n’est pas M Dubé qui se fera poursuivre lorsque nous ferons des erreurs par manque de temps et de ressources! Ce sera les médecins! Moi ça m’empêche de dormir la nuit ce genre de situation!!!

Éliane Lemire, M.D.


Je ne suis absolument pas d'accord avec le gouvernement concernant les mesures prises. Il me semble qu'il faudrait davantage trouver des qualités et des choses attractives concernant la médecine de famille pour attirer les nouveaux médecins au lieu de mettre des mesures coercitives. Nous sommes sur le terrain et voyons le réseau de disloquer de plus en plus chaque jour.

Nous avons besoin d'aide du gouvernement en améliorant l'accès aux autres professionnels de la santé. Cela nous enlèvera un nombre important de consultations en lien avec des problèmes locomoteurs qui pourraient être vus par les physiothérapeutes, des problèmes psycho-sociaux qui ne font qu'augmenter dans nos bureaux et qui représentent de longues consultations qui pourraient être vus par des psychologues et des travailleurs sociaux. Je ne comprends pas bien pourquoi il n'y a que des mesures prises contre les médecins, les autres professionnels peuvent eux aller travailler au privé ce qui prive énormément la population pour l'accès à ses professionnels.

Je suis moi-même malade avec des problèmes de douleurs chroniques, je continue à travailler tant bien que mal en faisant attention de ne pas nuire à mes patients, mais j'avoue m'épuiser un peu plus chaque jour.

Nous avons besoin d'aide pour relever le défi et aider la population. Pas de nous faire taper sur les doigts et nous faire traiter de tous les noms. Cela ne fera qu'aggraver le problème en faisant fuir le maximum de médecins, moi la première.

Je ne resterai pas au Québec dans ses conditions. J'ai déjà immigré de France et je n'ai pas peur d'aller travailler ailleurs pour avoir une meilleure qualité de travail et une reconnaissance.

Marta Darlak, M.D.


En tant que médecin spécialiste dermatologue, j’aimerais vous partager une réalité que vivent de plus en plus de mes collègues à travers le Québec : celle d’une pression économique croissante qui fragilise le maintien de soins médicaux en cabinet. […]

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, un cabinet médical de médecins spécialistes ne reçoit pas de financement de la part du gouvernement et ne fonctionne pas sans frais. En d’autres termes, les médecins spécialistes dermatologues doivent assumer toutes les dépenses associées au roulement de leur cabinet. Bien que la pratique soit enracinée dans la vocation de soigner, nous devons aussi en assurer la viabilité. Malheureusement, dans ce contexte économique, il devient de plus en plus difficile, voire impossible, de maintenir des services de qualité dans le cadre actuel du système public.

C’est avec regret, mais aussi dans un souci de pérennité et d’accès, que certains d’entre nous doivent envisager de recourir à une offre partielle ou complète en médecine privée. Cette décision ne découle ni d’un désir de profit, ni d’un désengagement du système public, mais bien d’un besoin de survie professionnelle. Le manque de financement des cabinets est la raison pour laquelle nous avons perdu juste cette année une bonne partie de nos membres médecins spécialistes dermatologues au sein du réseau public. Notre souhait est de continuer à vous offrir des soins accessibles, humains et de qualité. Mais pour y parvenir, il faut que notre modèle d’organisation soit viable.

Pratiquer la médecine dans le système public québécois est devenu, au fil des années, une tâche de plus en plus lourde. Derrière chaque consultation, chaque diagnostic, chaque traitement, se cachent des efforts constants pour compenser les défaillances d’un système qui s’effrite.

Le gouvernement ne fait que ternir l’image des médecins en véhiculant de fausses informations au sujet de notre pratique. Tous les médecins que je côtoie tiennent le fort depuis le début, mais nous subissons de la coercition et de la diffamation de la part du gouvernement au quotidien dans les médias, la motivation des soignants s’effrite de plus en plus sur le terrain tout comme le reste du système. Nous devons souvent faire plus avec moins : moins de ressources, moins de temps, moins de soutien. Nous pallions les absences de services, les délais déraisonnables, la complexité administrative, tout en tentant de garder la tête hors de l’eau et de maintenir des soins humains, accessibles et de qualité. Ce rôle de « tampon » entre le système et le patient, nous l’acceptons par dévouement. Mais il est devenu, pour plusieurs d’entre nous, épuisant. Nous portons sur nos épaules des responsabilités croissantes, sans que les conditions d’exercice ne suivent. Et il devient de plus en plus difficile de continuer à exercer dans un système qui, trop souvent, nous demande de nous sacrifier au nom d’une mission que nous partageons tous : soigner. La goutte cette année est le manque de soutien du gouvernement et du Collège des médecins.

J’en suis venue à l’évidence qu’après seulement 6 ans de pratique au sein du réseau public, je ne peux continuer ainsi. Il ne s’agit pas ici de se plaindre, mais de dire les choses franchement : la médecine publique telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui épuise ses artisans. Il est urgent de réfléchir à un modèle plus durable, qui permettra aux soignants de continuer à soigner sans y laisser leur santé. Je traverse moi-même présentement une période d’épuisement professionnel.

Les nouveaux projets de loi (83 et 106) mettent en péril non seulement nos droits et libertés en tant que médecin, mais aussi la sécurité des patients. Un modèle de pratique de la médecine axée sur la performance avec des pénalités prévues n’est pas réaliste et va inévitablement mettre la sécurité des patients en péril. Je suis, en tant que médecin spécialiste, très inquiète du futur de la pratique de la médecine au Québec.

Nous espérons que cette réalité pourra être comprise par la population, le gouvernement et le Collège, et qu’ensemble, nous pourrons encourager des solutions concrètes pour préserver un environnement de travail sain dans le système public.

Catherine Tremblay, M.D.


Je suis enchanté de voir le CMQ s’impliquer dans les dossiers qui concernent la qualité des soins aux patients et des outils / facilités offerts pour en assurer l’excellence.

Actuellement un climat d’affrontement se crée et nuit à une entente nécessaire; le CMQ doit intervenir pour appuyer les arguments de valeur de l’une et l’autre partie pour que ce dossier aboutisse et soit gagnant - gagnant.

Si les autorités veulent de la performance pour des soins à tous et de la qualité - ce qui est un but indiscutable - il faut qu’elle fournisse les outils / facilités nécessaires, ce qui n’est pas le cas à ce jour; au contraire, on annule des projets e.g. en anémie falciforme/thalassémie au CHUM, et on coupe des ressources et empêche des embauches utiles. D’autre part, les MD doivent performer davantage et se rendre disponibles pour répondre aux besoins - beaucoup le font, certains peuvent mieux et davantage - avoir choisi la médecine comporte des obligations sociales.

Ma retraite du CHUM est survenue le 01.07.2024 après 7 ans d’expertise en médecine de laboratoire (hématologie et immunologie) et depuis 1971 en pratique clinique. L’occasion m’a été donnée d’aider mes collègues à assurer les meilleurs soins. Durant ces années, j’ai pu observer la lourde tâche des mes collègues et leur dévouement marqué pour les patients, l’enseignement et rester à la fine pointe de leurs connaissances. Pas possible ici d’en faire davantage avec les ressources disponibles. C’est dans le sens du Dr V. Oliva.

La problématique des omnipraticiens m’est encore mal connue, mais leur président ne semble pas conciliant. Il y a certainement place à mieux faire…la capitation leur pend au bout du nez!6 Espérant que le CMQ puisse dénouer une partie de l’impasse pour le bien des patients.

Guy Biron, M.D.


Je suis résidente finissante en médecine familiale et cette loi me donne le goût de carrément ne pas entrer en pratique. Le gouvernement déshumanise la médecine et les humains qui y travaillent. Je vois ce qui m'attend et ça donne le goût d'abandonner. Pourquoi j'irais mourir à petit feu dans un système qui traite ses humains comme ça?

Je suis seulement résidente, mais je vois toutes les coupures. Les travailleuses sociales de notre unité d'hospitalisation ont leur bureau dans un garde-robe! Pendant 1 semaine à l'hospitalisation, on n’a jamais réussi à avoir de l'encre dans notre foutu imprimante pour imprimer les listes de patients. Le gouvernement a coupé physio/ergo la fin de semaine....mais veulent de la productivité de la part des MDs? Le patient de 85 ans a beau être guéri de sa pneumonie, s’il ne marche pas, il ne sort pas! Est-ce que c'est la responsabilité du MD ça? […]

Karine Sigouin, future médecin de famille


Je suis médecin de famille et je considère sérieusement quitter la province suite à l’annonce du nouveau projet de loi de la CAQ.

Je suis fâchée, je me sens en colère, frustrée que personne ne protège la bonne pratique médicale, personne ne comprend notre réalité. J’ai 3 jeunes enfants dont un 6 mois, 2 ans et 4 ans. Je travaille 5 jours / semaine et je suis loin de faire 450 000$ comme dit Dimitri Soudas à la radio. Je suis tannée de la mésinformation et de la compagne de salissage contre les médecins. Au Québec, on ne respecte pas la médecine familiale, on veut que je prenne 6 minutes avec chaque patient, je ne pense pas c’est de la bonne médecine. Je vois 14-17 patients par jour et je prends 30 minimum avec chaque patient parce que je pense c’est la bonne médecine, qui rallie empathie et écoute. Ce nouveau projet de loi me force à déménager avec ma famille malheureusement.

Nahla Boumahni, M.D.


À quand une mesure valide de performance de ce ministère, vue des soignants sur le terrain ?

François Lemieux, M.D.


En tranchant le lien qui unit le médecin de famille et son patient n’arrive-ton pas à détruire ce constituait à la fois l’essence de la relation. Thérapeutique et tout l’âne de cette médecine de famille que, par ailleurs, on dit défendre et vouloir perpétuer?

J’ai honte d’assister à la mise à mort de notre profession.

Que le collège défende ce lien me semble non seulement nécessaire mais requis pour tout lien de confiance entre ses membres et la population.

Mauvais choix pour un problème qui a d’autres causes.

Jean-François Tessier, M.D.


D'un côté, le gouvernement rend les salles d'opération très difficiles d'accès pour les chirurgiens. De l'autre, il les pénalise s'ils font attendre les patients avant leur opération. Je ne comprends pas la logique gouvernementale. Les chirurgiens ne demandent pas mieux que d'opérer le plus possible!

Jacques Smith, M.D.


Après 37 ans de pratique j'aurais aimé continuer ma carrière jusqu'à 40 années OU 42, soit encore 5 années. Malheureusement ce projet de loi entraînera une prise de retraite beaucoup plus rapide. Je prévois la prendre au courant de l'année en cours

2500 patients de prise en charge dont la moitié vulnérable, région de Lac-Mégantic, donc 2500 patients orphelins.

Plusieurs confrères sont dans la même situation que la mienne.

Ce projet de loi entraînera une augmentation du nombre de patiente orphelins au Québec par la mise à la retraite de nombreux médecins de plus 60 ans qui suivent à eux seule plus de 30 % de la population

Ce projet est néfaste pour l'accès aux soins, et le collège devrait penser à cette situation car elle entraînera une mise à la retraite très importante

René Lazure, M.D.


Comme médecin de famille œuvrant dans un GMF-U, je partage pleinement l’objectif que la population au complet ait accès à des services de première ligne de qualité. Toutefois, le projet de loi 106, dans sa forme actuelle, soulève de graves préoccupations, notamment par l’imposition de la prise en charge obligatoire des patients du territoire et l'imposition de conditions de pratique par règlements ministériels.

Dans mon territoire, nous comptons parmi les plus faibles ratios de médecins de famille par habitant au Québec. La moitié d’entre eux travaillent exclusivement en deuxième ligne, simplement pour maintenir ouverte notre urgence et notre hôpital. Parmi ceux en première ligne, plusieurs sont en fin de carrière. Dans ce contexte, il est irréaliste — et dangereux — d’exiger que nous ajoutions chacun et chacune des milliers de patients à notre charge.

Notre CISSS, en déficit chronique, n’a jamais été en mesure de doter adéquatement les postes d’aide professionnelle promis en GMF-U ou en GMF. Nous nous faisons torturer par des dédales administratifs infinis pour chaque amélioration ou innovation que nous tentons d'amener à notre fonctionnement. La transmission des labos et documents est inconstante, les guichets oublient des patients, et nous devons être constamment hypervigilants pour qu'aucun patient ne subisse de préjudice de tous les divers procédés informatiques et administratifs imposés par le gouvernement. Nous n’avons ni les ressources ni les conditions pour répondre aux obligations proposées par ce projet de loi.

Dans notre GMF-U, nous croyons à une médecine de famille exemplaire, basée sur la continuité et la qualité. Or, plusieurs collègues envisagent sérieusement déjà la retraite ou une réorientation. Car si nous perdons notre autonomie professionnelle et la capacité de pratiquer une médecine sécuritaire, comment pouvons-nous continuer à pratiquer ce métier que nous aimons et à transmettre la passion aux prochaines générations?

Ariane Courville-Le Bouyonnec, M.D.


Je le sais et vous le savez: il y a une plaie à peine cachée au centre des arguments récents (et passablement usés) de M. Legault, en ce qui concerne le fameux tiers de médecins dits non performants, où est à peine sous-entendu « rebelles, paresseux ou opportunistes », et sur lequel le PM justifie ses réformes douteuses. Je draine ici pêle-mêle l’abcès que j’ai sur le coeur. Accrochez-vous, pauvre de vous, y a pas mal de stock.

Re: Sur la sous-performance des individus

[…] Témoin privilégiée de la réalité sur le terrain, la plupart de mes collègues « non performants » sont:

1- des médecins de la première ligne qui portent plusieurs chapeaux professionnels, dont celui de la pratique hospitalière, l’enseignement, la recherche, la gestion administrative, etc.

2- et/ou des médecins de famille dont la pratique est axée sur ces nombreux troubles de santé complexes rencontrés en première ligne, et largement incompris des décideurs: soit la psychiatrie de légère à lourde, l’itinérance ou la toxicomanie, les troubles neurocognitifs des ainés et des enfants, les douleurs et dysfonctions chroniques multisystémiques dont les « longs covidiens » font partie, la santé des réfugiés ou des autochtones, les très nombreux patients que leur emploi rend malade, etc. C’est le quotidien de la pratique en première ligne. Ces patients vulnérables et leurs soignants vivent des situations chronophages et énergivores, bien maladaptées, j’avoue, au système de rémunération actuel.

3- et/ou des femmes médecins essoufflées, mère ou aidante naturelle de proches chroniquement malades ou dépendants, et qui constitue pourtant la majorité de ce groupe présumé « non-performant » et chez qui incombe ces rôles sociaux non rémunérés

4- et/ou des médecins eux-mêmes affligés de conditions de santé physique ou mentale réelles mais invisibles aux yeux des politiciens. […]

La mentalité désuète des politiciens

[…] Bref, les liens entre médecins et gouvernement en ce moment sont toxiques et minés d’avance. C’est alors la guerre peu glorieuse des égos les plus batailleurs de part et d’autres, comme un Nième combat de coq, inutile, vulgaire et « laite ». Pendant ce temps les poules pas de tête courent dans tous les sens pour protéger leurs poussins de plus en plus vulnérables sur le terrain accidenté de la basse-cour, à l’ombre de la blanche et haute tour d’ivoire.

Re: La première ligne en piteux état

Souvent ces définitions de performance entrent carrément en conflit avec les enseignements du collège des médecins et des facultés de médecine, nous incitant à faire du « tournage de coins ronds » à l’intérieur du système, ce qui nous empêche de voir les angles morts où certains citoyens dépérissent ou meurent. Que fait-on des interventions médicales qui auraient dû être faites pour empêcher de coûteuses complications? Et celles qui auraient pu être évitées si un professionnel de la santé avait eu, ou pris le temps de questionner, examiner en temps opportun?

Les politiciens par ailleurs instrumentalisent les chiffres pour plaire aux égos plutôt que de chercher à respecter la santé des corps et âmes: c’est immoral, irresponsable et contre-productif. Hélas la réalité frappe toujours de plein fouet ceux qui s’en déconnectent, non sans avoir nuit au préalable aux patients vulnérables sur la ligne de front, exposés contre leur gré à la vision étroite et irrespectueuse de ces décideurs.

La structure du système public de santé qui s’effondre

Il semble que la première ligne soit devenue un goulot d’étranglement beaucoup trop fin, placé trop près de la base même de la lourde structure qui le domine. Un passage étroit doté en plus d’un système de filtrage technocratique reposant de moins en moins sur l’art et la science médicale avec le temps, mais sur des enjeux politiques discutables. Dans ce contexte, les maladies complexes et invisibles (n’ayant aucune valeur électorale) n’arrivent plus à traverser ledit goulot. Pire, avec ces réformes de la santé, on veut transformer nos médecins en techniciens dociles et interchangeables, sans égard à l’importance du lien thérapeutique, de leur savoir-être distinct de soignant, construit sur des années, ni tenir compte de leurs forces et défis professionnels ou personnels dans la pratique. C’est une conception robotisée des tâches humaines, un vieux fantasme d’ingénierie, et c’est ce qu’on tente d’imposer aux infirmières, préposés aux bénéficiaires, et même en éducation chez nos enseignantes, psychoeducatrices, orthophonistes, etc. On tente maintenant de faire pareil avec les médecins pour gérer la santé d’humains, surtout depuis que ça se féminise à grande échelle. Assez dystopique merci…

Les solutions requièrent un changement de mentalité politique

Les solutions sont de décentraliser le pouvoir, de rassembler les savoirs de tous, tout en gardant le cap sur des objectifs communs et pérennes. Et de procéder de la même façon à toute échelle du système pour maintenir à la fois de la cohérence et de la flexibilité face aux grands et petits défis de santé de la société. Il nous faut réparer le tout en se basant sur cette approche.

Pourtant, comme vous l’avez mentionné dans votre article, la liste des suggestions d’un comité d’experts du gouvernement, plus appropriées et respectueuse de tous les gens impliqués, de la science et des données sur le terrain, aurait été présentée au PM. Hélas le Roi qui fait la Loi n’en a que faire, encore une fois.

Mon contre-argmument aux propos de ce dernier est que la plupart des docs dits « non performants » (ces tiers-mondistes de la performance) favorisent pour la plupart sciemment la qualité de l’acte, en accord d’ailleurs avec les valeurs consensuelles de la société, la science et l’autorité du collège des médecins, plutôt que la quantité, et ce, en fonction de leurs limites personnelles, relationnelles, familiales, sociales. Ils le font moins parce qu’ils succombent bassement à un « péché capital », tel la paresse ou l’orgueil par exemple. Ça aussi c’est réducteur! Tout comme l’appellation « anges gardiens » d’ailleurs… même feu le Pape François n’aurait « bashé » ainsi toute une communauté médicale à bout de souffle. […]

Les médecins en mode fight or fly

A l’opposé, j’ai constaté que plusieurs médecins dits « performants » ont jeté l’éponge au fil de leur pratique et choisissent la quantité des actes au détriment de la qualité, sans bien sûr tout à fait se rendre compte qu’ils tournaient les coins ronds pour que cette pratique « fitte » mieux dans ce système boiteux, étanche et trop compartimenté. Certains, je vous l’accorde ont la morale élastique mais pas la majorité! Donc la plupart du temps, la motivation des performants n’est pas seulement de faire plus d’argent mais aussi d’être bien accepté (vu, respecté) d’autrui et d’avoir l’impression d’un certain contrôle sur le chaos croissant des demandes de soins. Mais ils sont bien sûr incapables d’endiguer ce tsunami de besoins en santé, pourtant déjà prévu de longue date. Bref ils entrent alors dans une réponse flight or fight personnelle, plus ou moins consciente, et où l’équilibre n’est jamais atteint au final.[…]

Les effets secondaires du paternalisme politique

En d’autres mots je comprends qu’avec une production industrielle d’actes médicaux les revenus ainsi générés sont attrayants, mais pas que: tenter de soigner des gens dans un système de santé aussi abimé génère un stress logistique significatif au quotidien, une perte de sens et de motivation, une usure de compassion ainsi qu’une réelle souffrance éthique dont on ne tient pas compte (c’est presque tabou d’en parler dans le milieu). Mais ça détruit petit à petit la santé de tout soignant doté d’un minimum d’empathie. Parlez-en aux autres catégories de soignants et même aux enseignants: ils vivent le même Mal insidieux, toujours en 2025, qui use aussi la compassion petit à petit si ce n’est pas la santé globale. Jusqu’à penser que c’est normal. Foutaises. […]

Marielle Trottier, M.D.

Note : L’autrice de ce commentaire a soumis un article complet sur son analyse; nous avons choisi de publier un extrait dans l’espace Forum.


Les médecins ont fait le serment d’Hippocrate à leur entrée en médecine. Nous avons la responsabilité morale et professionnelle de donner le meilleur de nous-même à la population québécoise.

Nous enseignons, nous partageons, nous supportons, nous écoutons, nous sommes professionnels. La loi 106 place encore une fois une pression énorme sur les médecins. Un fusil sur la tempe oserais-je dire…

Comment alors donner des soins optimaux lorsque qu’on nous menace, qu’on nous presse le citron, qu’on nous dénigre, qu’on nous impose des coupures financières selon notre « rendement», …, qu’on nous noue mains et poignets (manque de personnel, DME dysfonctionnels, absence d’accessibilité aux blocs opératoires,…),...

Le Collège est là pour protéger la population. À quand une sortie publique du Collège pour dénoncer le tort que notre gouvernement et ses politiques déconnectées fait à ceux qui maintiennent à bout de bras le système? Il est facile de blâmer un médecin épuisé, surchargé, empêtré par la paperasse, les AMP,… À quand des accusations envers nos décideurs?

J’ai maintenant un fusil sur la tempe. On me demandera peut-être de prendre moins de temps pour voir mes patients. Je ferai alors de la très mauvaise médecine. Qui blâmer alors? Celui qui a le fusil sur la temps ou celui qui le tient ? J’ai 26 ans de pratique médicale. Je suis épuisé et démotivé par ce qui arrive en ce moment au Québec. Les jeunes résidents sont inquiets. Mes collègues pensent quitter pour la retraite ou quitter le système. La situation actuelle me dégoûte.

Pierre Collin, M.D.


La manque d’accès aux médecins est la faute du gouvernement qui limite les licences! On perd beaucoup de résidents extraordinaires qui pourraient devenir les médecins extraordinaires. En plus, c’est beaucoup trop difficile pour les médecins immigrants d’avoir une licence ici, et beaucoup de ces médecins font d’autres choses. Quel gaspillage.

Judy Glass, M.D.


Le problème ne vient pas des médecins. Il est facile de nous utiliser comme cible. Le problème est le manque de ressources combiné à la complexité des patients. Je suis urgentologue à l'Hôtel-Dieu de Lévis. J'aimerais voir plus de patients. Je suis capable de voir plus de patients. Par contre, lorsque je dois voir à l'ambulatoire un patient de 90 ans, en chaise roulante, qui peine à se mobiliser, avec des problèmes de santé complexes inadaptés pour l'ambulatoire (parce que nous n'avons plus de civières, parce que les patients admis ne montent pas à l'étage etc.), habillé en civil, c'est certain que les précieuses minutes s'accumulent. Bien beau rendre les médecins imputables, mais pourquoi ne pas rendre le gouvernement imputable? Améliorer les conditions de travail?

Je pourrais en parler longtemps. Ce PL est problématique et ne réglera pas la base du problème.

Améliane Tardif, M.D.


Selon moi, ce PL va à l’encontre de plusieurs articles de notre code de déontologie.

Dans le PL, il est écrit que « le ministre peut, par règlement, établir définir des modalités de prise en charge d’une personne assurée par un professionnel de la santé et, le cas échéant, les obligations que cette prise en charge emporte pour ce professionnel ».

Or, selon les articles suivants de notre code de déontologie :

· Article 7 du chapitre 1 de notre code de déontologie : le médecin doit ignorer toute intervention qui ne respecte pas sa liberté professionnelle’.

· Article 42 Qualité de l’exercice : Le médecin doit, dans l’exercice de sa profession, tenir compte de ses capacités, de ses limites ainsi que des moyens dont il dispose.

· Article 43 Qualité de l’exercice : Le médecin doit s’abstenir d’exercer sa profession dans des circonstances ou états susceptibles de compromettre la qualité de son exercice ou de ses actes ou la dignité de la profession.

· L’article 63.1 section VI se lit, lui, comme suit : Le médecin ne doit adhérer à aucune entente ni accepter aucun bénéfice susceptible d’influencer son exercice professionnel tant au regard de la qualité des soins que de leur disponibilité et de la liberté de choix du patient.

Le projet de loi stipule que 25% de notre rémunération sera liée à l’atteinte d’indicateurs de performance fixés par le gouvernement. Comment un médecin pourra-t-il alors s’assurer de son indépendance et de la qualité de soins qu’il prodigue?

· 64. Le médecin doit ignorer toute intervention d’un tiers en vue d’influer sur l’exécution de ses devoirs professionnels au préjudice de son patient, d’un groupe d’individus ou d’une population

Merci de porter actions pour que la qualité des soins ne soit pas brimée par un projet de loi.

Annie Jasmin, M.D.


Excellent moyen d’encourager les préretraités à temps partiel à quitter le réseau le plus vite possible…

Helene Cyr, M.D.

Vos réactions sur l’état des infrastructures en santé


Je vous écris suite à l'appel lancé par le CMQ pour obtenir des informations de terrain sur les impacts de la vétusté des infrastructures sur les soins de santé au Québec. Je suis internistes à l'hôpital Sainte-Croix de Drummondville.

Voici donc quelques exemples concrets. Il n'y a en fait rien de nouveau. Tout cela a déjà fait l'objet de reportages publiés par différents médias.

Mentionnons donc les chambres à quatre avec 1 seule toilette. Pas besoin de dire que ce n'est pas optimal pour la prévention des infections. Et pour l'intimité et la dignité. Très peu d'espace pour circuler en les lits, les chaises d'aisance, les chaises et les visiteurs...

Manque d'espace sur les postes des unités. Les postes ont été conçus pour une autre époque. Il y a maintenant beaucoup plus de professionnels sur les étages et aussi des étudiants de plusieurs disciplines. Il y a en plus le dossier numérique (DSN) qui s'en vient dans quelques mois. Les espaces de travail sont carrément insuffisants et la situation sera catastrophique avec l'implantation du DSN. Malgré cela, les projets de rénovations qui devaient avoir lieu sur deux étages de médecine sont reportés. L'urgence souffre aussi du manque d'espace. Encore une fois, les travaux pour la mise en place d'une urgence modulaire sont retardés.

Fuites d'eau en oncologie : le passage et un des bureaux a dû être fermé pendant plusieurs mois en raison d'une fuite d'eau. Les patients qui avaient des rendez-vous devaient passer par la salle de traitement, devant les patients recevant leur chimiothérapie, pour accéder aux bureaux des médecins. Les médecins ont dû parfois voir les patients d'oncologie dans une autre clinique sur un autre étage. Tout cela a eu un impact négatif sur le moral du personnel et sur la productivité et n'était vraiment pas l'idéal pour l'intimité des patients qui recevaient leur chimiothérapie. Les réparations ont pris des mois, maintenant c'est réglé, jusqu'à la prochaine fois.

Les chirurgiens pourraient vous parler mieux que moi des problèmes au bloc opératoire.

Dans ce contexte, les propos du ministre de la Santé et du premier ministre sur le travail des médecins sont tout simplement inacceptables.

Daniel Viens, M.D.


Les 2 pieds dans la réforme de style autoritaire, je me questionne sur ma place dans le réseau de la santé. Depuis 2005, je pratique à l’hôpital de Drummondville, à l’urgence temps plein actuellement et l’hospitalisation jusqu’en 2020 (double tâche hospitalière pendant 15 ans). J’ai vu le réseau changer, se dégrader. Tous les jours, nous gérons les bâtons dans les roues, les obstacles administratifs, manque de personnel, mettre du papier carbone dans la plaqueuse parce que nous n’avons plus d’encre car le modèle est BO. Pas de toilette pour le personnel et pour les patients du côté de l’urgence majeur pendant 3 mois car la tuyauterie est désuète et difficulté à la réparer. Je devais sortir de mon département pour aller à la salle de bain….

Que dire du personnel manquant, sous-qualifié, qui ne reste pas en poste car les conditions sont trop difficiles à l’urgence. Nous avons optimisé nos horaires, même si en quart défavorable, pour donner plus d’accès aux soins. Aucune augmentation de salaire depuis des années pour les urgentologues qui tiennent le réseau à bout de bras. Et voilà, qu’on se fait dire qu’on ne travaille pas et que je vais être payé 25% moins cher qu’avant. Sérieusement?

Je suis prisonnière de mon diplôme de médecine qui ne me permet pas de changer de domaine, ce que je ferais sans hésitation si je le pouvais. La quantité de soins est grandissante, nos installations plus que déficientes, le manque de personnel, des décisions administratives CIUSSS sans notre avis qui nous empêchent d’avancer, le réseau informatique inefficace de notre hôpital et j’en passe. Que dire des plaintes hospitalières grandissantes envers les urgentologues. Tellement que j’ai de jeunes collègues qui songent à quitter la profession.

La pression est grande de partout. Le presto va sauter… le presto a sauté…

Depuis longtemps qu’on le dit

Ça y est.

Les dégâts vont être épouvantables.

Je souhaite que nos associations fassent tout en leur pouvoir pour maintenait le standard de qualité de soins que tous les médecins essaient de donner malgré l’effondrement du réseau. Il va falloir que les gens comprennent, le standard de soins ne sera plus jamais leur même, le CMQ devra le comprendre aussi.

En espérant un issu positif de toute cette situation. Habituellement je trouve un côté positif à chaque situation négative. Cette fois ci je n’y arrive pas.

Merci pour votre travail et votre support

Julie Thibault, M.D.