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Aide médicale à mourir : le CMQ est favorable à un élargissement lors de troubles neurocognitifs et propose des balises pour les cas de santé mentale

Lisez le communiqué de presse publié le 13 décembre 2021 par le CMQ au sujet de l'aide médicale à mourir.

  • Le Collège recommande une harmonisation des lois québécoise et canadienne, car la non-concordance dans le choix de certains termes induit une confusion susceptible de porter préjudice.
  • Troubles neurocognitifs : l’aide médicale à mourir (AMM) peut être envisagée, avec une demande anticipée, par une personne consciente du risque inévitable de perdre son aptitude.
  • Maladie mentale : le Collège est favorable à l’élargissement de l’admissibilité de l’AMM dans les cas où un trouble de santé mentale est le motif principal de la demande.

Montréal, 13 décembre 2021 – Au terme de la démarche de son groupe de réflexion portant sur l’élargissement de l’admissibilité à l’aide médicale à mourir, le Collège des médecins du Québec (CMQ) annonce le positionnement entériné par son Conseil d’administration concernant le trouble neurocognitif, la maladie mentale, les mineurs, ainsi que la fatigue de vivre. Étant donné le manque actuel d’harmonisation entre les dispositions du Code criminel sur l’AMM et la Loi concernant les soins de fin de vie, le Collège avait mis sur pied le printemps dernier un groupe de cliniciens pour mener une réflexion approfondie sur l’ensemble des aspects cliniques, éthiques, déontologiques, légaux et organisationnels de l’AMM, dans un contexte de soins de fin de vie.

En premier lieu, le Collège recommande une harmonisation des lois québécoise et canadienne encadrant l’AMM, car la non-concordance dans le choix de certains termes induit une confusion susceptible de porter préjudice. De fait, depuis le retrait du critère de fin de vie comme condition d’admissibilité à l’AMM, les deux lois reconnaissent maintenant les maladies neurodégénératives comme des états pouvant conduire à une demande d’AMM. Toutefois, la loi canadienne utilise les termes maladie, affection et handicap, tandis que la loi québécoise emploie uniquement le mot maladie.

Troubles neurocognitifs

Pour une personne atteinte d’un trouble neurocognitif, apte à consentir et consciente du risque inévitable de perdre son aptitude, le Collège croit que l’AMM peut être envisagée par une demande anticipée. Pour le Collège, cette directive, formulée après la confirmation du diagnostic, deviendrait contraignante et impossible à renverser par un tiers.

En ce qui a trait aux personnes devenues inaptes après avoir donné un consentement valide, le Collège reconnaît l’impasse vécue par les soignants au moment d’abréger la vie d’une personne qui ne se souvient pas du consentement préalablement donné, qui ne paraît plus souffrir de sa situation et qui refuse le soin. Dans ces contextes, un refus catégorique par le patient devra être respecté.


Maladie mentale

Le Collège est favorable à un élargissement, dans les cas où un trouble de santé mentale est le motif principal de la demande de ce soin. De l’avis du Collège, il faut reconnaître que le niveau de souffrance élevé engendré par certains problèmes de santé mentale peut être aussi inapaisable que celui rencontré dans tout autre problème de santé.

Le Collège propose donc des balises pour guider les cliniciens, comme dans le cas de l’idéation suicidaire, inscrite dans la symptomatologie décrite d’un trouble mental, qui devrait être exclue. Le Collège recommande également comme balises que la décision soit prise au terme d’une évaluation globale et non uniquement inscrite dans un épisode de soins, l’exigence d’un long parcours de soins avec suivis appropriés et la présence d’une souffrance psychique intense et continue.

Mineurs

0-1 an
Le Collège estime que l’AMM peut être un soin approprié dans les cas de bébés âgés de moins d’un an, victimes de souffrances extrêmes qui ne peuvent être soulagées, couplées à des pronostics très sombres, et affectées par des malformations sévères ou des syndromes polysymptomatiques graves, qui annihilent toute perspective de survie. Ce soin devrait être encadré par un protocole strict. Le Collège estime que l’expérience des Pays-Bas (protocole de Groningen) est une voie à explorer.

14-17 ans
Le Collège considère que le mineur âgé de 14 à 17 ans peut demander l’AMM conjointement avec le titulaire de l’autorité parentale ou le tuteur. Le Collège appuie sa position sur le fait que la souffrance ne tient pas compte de l’âge et que chez les mineurs elles peuvent être aussi intolérables que chez les adultes.

Fatigue de vivre

Le Collège est sensible à la situation des personnes âgées qui ne sont pas à proprement parler dans un contexte de fin de vie, mais qui expriment clairement leur désir de mettre un terme à leur existence en raison de souffrances intolérables ou invalidantes. Afin de concrétiser leur volonté, ces personnes n’ont actuellement d’autre choix que le suicide passif par dénutrition et déshydratation volontaires. Bien que troublant, l’enjeu ici est beaucoup plus existentiel, sociologique et philosophique que médical. De l’avis du Collège, il faut que ce débat soit élargi à la société tout entière. Par conséquent, le Collège choisit à ce moment-ci de retenir son positionnement.

« Depuis plus de douze ans, le Collège se prononce sur divers enjeux médicaux, éthiques et déontologiques entourant l’AMM. Une fois de plus, les récents travaux du Collège portant sur ce soin se sont inscrits dans sa mission de protéger le public en offrant une médecine de qualité, ce qui inclut les soins de fin de vie et l’accès à une aide médicale à mourir de qualité. Dans le cadre de cette démarche, plusieurs initiatives ont été déployées : appel de mémoire des membres, consultation sur invitation, sondage auprès du public et des médecins, et journée de réflexion. Ces démarches nous permettent aujourd’hui de prendre des positions bien définies qui s’appuient sur un argumentaire clair et rigoureux. Nous continuerons de participer activement aux discussions sur cette question », a déclaré le Dr Mauril Gaudreault, président du CMQ.